Voix d'Afrique N°69....

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LES PREMIERS
DISCIPLES DE
LAVIGERIE

Dans notre dernier numéro, nous avons commencé à décrire les débuts des " Pères Blancs ". Il s'agissait d'une véritable aventure de l'Esprit. Lorsqu'il recevait les premiers volontaires, Lavigerie était sans doute rempli de joie, car ces jeunes gens le rejoignaient dans son idéal missionnaire. Mais il n'avait pas encore d'idée préconçue : fallait-il des religieux, des prêtres, des frères ? Il n'y avait pas de modèle, il fallait tout imaginer.


Premier Noviciat

La première conviction de Lavigerie : il fallait une formation spirituelle très solide. Pour cela, il appelait ces jeunes à une année de noviciat. Il confiait cette tâche à un Jésuite, le Père Vincent, avec la consigne : “Formez des apôtres et suivez exactement la direction du noviciat de la Compagnie. Des Saints ! Je veux des saints ! Jetez les bien dans le moule de St. Ignace…”

En 1869, le Père Vincent décrivait ainsi les débuts : “Cette petite Société qui doit sa naissance au zèle pour la gloire de Dieu et un ardent désir de la conversion et du salut des Arabes, est appelée : “Société des Missionnaires de Notre Dame d'Afrique”…

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Maison Carrée actuelle et maquette de Maison Carrée à l'époque

Afin de les rendre plus accessibles chez les Arabes, la Société donne à ses membres un costume religieux qui se rapproche pour la forme et la couleur de celui des peuples qu'ils sont appelés à évangéliser… C'est le propre de leur vocation d'aller dans divers lieux, dans le centre de l'Afrique, soit chez les Mozabites et les Touaregs du Sahara, soit chez les Touatiens et les Nègres du Soudan… Pour atteindre le but que se propose la Société, deux langues sont nécessaires : le kabyle et l'arabe. Ils s'appliqueront sérieusement à l'étude de ces langues, non moins qu'à l'étude de la théologie…

Au bout de quelques mois d'étude, ils parleront alternativement arabe ou kabyle en récréation, et ils s'exerceront à faire le catéchisme en ces langues aux enfants de l'orphelinat. Chaque jour ils cultiveront leur mémoire en apprenant par cœur une page du catéchisme arabe ou kabyle… A la théologie et à l'étude des langues, nous ajouterons un petit cours de médecine… car chez les Touaregs, les Mozabites et les Taoutiens, les médecins sont en grande vénération…”

Treize jeunes hommes

Le premier groupe comprenait treize jeunes hommes. Les jeunes séminaristes Barbier et Poux qui avaient eu, les premiers, le désir de devenir missionnaires, (cf. n° 68, “Promenade à la Fontaine romaine”') sont renvoyés chez eux : ils avaient manifesté des répugnances à se soumettre à quelques pratiques du règlement. Lavigerie tenait à limiter le nombre des novices, à n'admettre que des sujets présentant des qualités plus qu'ordinaires.

Un postulant, Victor Cordier, s'était signalé par une dévotion exceptionnelle : il se plaignait de n'avoir pas assez de temps pour prier. Or, le 22 janvier 1869, il s'esquiva pendant les exercices du matin, emportant les quelques centaines de francs que contenait la caisse de l'économe…

A rude école.

Les futurs missionnaires adoptent une rude discipline. Le règlement prévoit : “à dater du jour de leur prise d'habit, ils ne devront plus se servir entre eux, durant les récréations, d'aucune autre langue que l'arabe et le berbère. à dater du même jour, ils devront coucher vêtus de leur robe blanche et de leurs habits de dessous, sur un matelas de paille de maïs ou sur une paillasse. à dater du jour de leurs promesses … ils coucheront simplement sur une natte.

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Droite: photo prise lors de la fête patronale le 8 décembre 2005 à Rome Maison Généralice

Pour la nourriture, ils auront un ordinaire qui se rapproche autant que possible, pour le genre de mets, de la nourriture des Arabes. Le costume religieux devant aussi se rapprocher pour la forme et la couleur de celui des Arabes, on adoptera le suivant : … ils auront une gandoura en laine blanche pendant l'hiver et une cotonnade de même couleur pendant l'été ; ils pourront joindre un burnous de même couleur et un rosaire ou chapelet autour du cou.”

Pèlerinage

Après quelques mois de formation spirituelle, les novices sont envoyés pour mettre à l'épreuve de l'action leur désir missionnaire. Ils partent en pèlerinage au sanctuaire de Santa Cruz, près d'Oran. Partis le 20 février 1869, ils passent par Miliana, El Asnam (alors connu comme Orléansville) et Relizane, emportant dans un couffin un peu de linge et quelques articles de pharmacie.

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Sanctuaire actuel de Santa Cruz et la statue de la vierge

Ils vivraient d'aumône, mais Mgr.Lavigerie tient à être le premier à leur donner une obole. Ils visiteront les Arabes dans les tribus, à droite et à gauche, sur leur passage en ayant soin de les édifier en Dieu, leur montrant une grande charité et une affection sincère en Notre Seigneur, leur rendant service, au besoin consolant leurs malades et exerçant à leur égard tous les bons offices de la charité . De retour au noviciat pour la Semaine Sainte, le 22 février, ils reprennent leur formation auprès des orphelins recueillis après la récente épidémie de cholera : catéchistes ou infirmiers, ils prenaient goût à la vie apostolique. Tels sont les premiers pas des Missionnaires d'Afrique.

D'après le livre “Les origines de la Société des Missionnaires d'Afrique (Pères Blancs)”
Maison-Carrée (Alger) 1929



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