Un choix difficile
!
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Luc
était parti de chez lui, le Burkina Faso, depuis de longues années,
avec le très grand rêve de devenir très riche, avec une
très belle femme et de nombreux enfants. Même ses parents avaient
bien voulu partager avec lui cette “belle idée” en l’aidant, avec une
modeste somme d’argent, au départ. En effet, il n’était pas
si difficile d’atteindre les côtes de la mer Méditerranée
par Bamako, Gao et Adrar ; puis traverser la mer du côté du Maroc
était une distance moins grande qu’entre deux villages du pays!
Une fois
sur les routes du désert, il se rendit bien compte que la réalité
était bien autre ! Beaucoup de ses compagnons de routes moururent de
soif, de faim et de fatigue. Avec beaucoup de souffrance et mettant sa propre
vie en péril, il atteignit Tamanrasset et arriva à passer les
nombreux barrages de la police et de la gendarmerie pour finalement aboutir
à Alger. D’abord, il se fit passer pour Ivoirien, puis pour Malien
et à la fin tout simplement comme Burkinabé. Plusieurs fois,
il entama des essais pour se rendre au Maroc dans le but d’atteindre l’Europe,
mais à chaque fois il échoua. Il lui est même arrivé
de se faire refouler, après arrestation, jusqu’à la frontière
du Mali.
Le temps à Alger, il le passa en faisant le cordonnier dans un coin
de la rue grâce à un outillage de base, obtenu par une aide financière
de Rencontre et Développement (CCSA), une petite association œcuménique
à Alger. Il se fit ramasser à plusieurs reprises par la police
et il a fallu renouveler plusieurs fois l’outillage et l’aide financière.
Pour préparer son avenir, un peu incertain, l’aide de R&D (CCSA)
lui permit de suivre des cours de bureautique pendant plusieurs mois.
Petit
à petit, après un énième ramassage de son atelier
par la police avec quelques jours de prison, après un énième
refoulement à la frontière, l’idée de retourner dans
son pays commença à prendre forme. Le refus du bureau du HCR
à Alger de le considérer comme réfugié renforça
en lui l’idée qu’il vallait mieux repartir. Un projet de réinsertion,
monter un cybercafé, lui semblait tout à fait réalisable
et R&D (CCSA) se disait prête à lui organiser le retour au
pays et à lui fournir le nécessaire pour réaliser son
nouveau rêve. Il a fallu encore de nombreux mois et de nombreux entretiens
avec nous pour faire lever ses hésitations, ses peurs et sa honte de
revenir vers ses parents, sa famille et ses amis du village comme un migrant
“raté”. Mais, enfin, il se décida : une dernière prière
à Notre Dame d’Afrique, un dernier adieu à R&D (CCSA) et
aux amis d’Alger et le voilà sur la route du retour grâce aux
points de relais formés par les communautés des Pères
et des Sœurs à Ghardaïa, Adrar, Gao, Bamako et point final : Ouagadougou
!
Il a fallu encore quelques mois pour le transfert du financement, pour la
location du local et l’achat du matériel, mais grâce au soutien
d’un confrère sur place et l’intérêt des uns et des autres,
le projet a pu voir le jour juste avant le début du Championnat Mondial
de Football, ce qui permit à de nombreux supporteurs de ce sport, de
suivre ses matches en direct et d’y mettre une bonne ambiance de fraternité
africaine!
Frère Jan Heuft, M.Afr..
Président de R&D (CCSA)
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