AUMONIER
DES ETUDIANTS
|
P
our parler de mon travail d’aumônier des étudiants à Tabora,
en Tanzanie, il me vient en tête l’image du Christ, le Bon Pasteur.
Les étudiants seraient-ils comparables à des moutons ? Peut-être,
à certains égards : quand un style de cartable est à
la mode, tous veulent se le procurer ; une façon de porter la cravate
scolaire devient à la mode, et tous la portent de cette façon-là.
La pression du groupe est une force convaincante. Cependant, très souvent,
les jeunes ressemblent à des moutons sans berger. La jeune génération
est confuse : on lui présente tellement de styles de vie différents.
J’ai, quant à moi, l’immense privilège de lui proposer le chemin
du Christ.
Les jeunes manquent de modèles à suivre. Dans la société
tanzanienne, la vieille génération avait coutume de fournir
ces modèles. Mais la présentation continuelle, par les médias,
de la corruption et de l’égoïsme des hauts dirigeants aux dépens
du développement national, une économie sauvagement capitaliste
et l’émergence d’un système de classes où les enfants
des riches parlent anglais et le reste, swahili, tout cela rend caducs les
bons exemples des héros nationaux comme Julius Nyerere.
Dans
un tel contexte, je me rends compte que la nouvelle génération
accorde une attention nouvelle aux conseils évangéliques et
à l’enseignement social de l’Église. Après nombre de
séminaires parrainés par le gouvernement dans les écoles
et collèges sur le thème du SIDA et des rapports sexuels protégés,
je découvre qu’il y a un énorme intérêt à
explorer d’autres styles de vie. L’enseignement catholique sur l’abstinence
et la fidélité tombe comme quelque chose de frais, nouveau et
fascinant pour la jeune génération, et les discussions sont
toujours animées !
La liturgie dominicale est source de grande joie et d’espérance, exprimées
par la musique et la danse. Il arrive même que cette joie pousse un
vieux missionnaire guindé comme moi à ‘danser avec énergie
devant le Seigneur’ - pas tous les dimanches, rassurez-vous.
Bon
nombre d’élèves, dans les écoles secondaires de Tabora,
proviennent des zones rurales, presque non encore évangélisées.
Le contact avec un environnement urbain moderne pousse certains à s’inscrire
pour le baptême. Les discussions sur l’utilité ou la validité
des aspects de la religion traditionnelle africaine, - sacrifices, guérisons,
envoûtements, etc. - signifient que les questions et réponses
du catéchisme sont souvent laissées de côté, et
je vagabonde intellectuellement en territoire inconnu – peu sûr des
réponses, bien que ce soit fascinant !
Le travail d’aumônerie et l’enseignement de la religion dans les écoles
doivent être soupesés (être faits en tenant compte de l’intérêt
qu’on doit porter à ceux qui ont une autre croyance ou qui ne croient
pas) avec des responsabilités envers ceux des différentes croyances
et d’aucune. Notre bibliothèque doit conserver un stock de manuels
récents, et nous devons nous intéresser aux équipes de
tennis de table, de football ou de basket-ball.
Une troupe théâtrale favorise les jeunes talents, et notre propre
studio vibre (il est insonorisé) au rythme de Bongo Flava - rap style
tanzanien. Toutefois, mon premier amour du côté loisirs est ‘The
Dance Machine’, un groupe qui reproduit la danse populaire américaine
transposée à l’ouest de la Tanzanie. La ‘Dance Machine’ est
un grand groupe d’étudiants qui préparent des programmes de
danse pour les grands événements du calendrier social de Tabora.
Ils sont bons ! Je me demande toujours comment ils font pour tourner sur leurs
têtes sans se casser le cou.
Ici,
dans la partie historique de Tabora, nous nous sentons quelque peu indignes
de perpétuer l’œuvre de ces pionniers héroïques qui ont
commencé la proclamation de la Bonne Nouvelle en 1878. La plupart des
lieux qu’ils ont connus sont encore là. Mais il y a toujours du travail
à faire après toutes ces années de présence des
Missionnaires d’Afrique. La nouvelle génération a, elle aussi,
besoin d’entendre la Bonne Nouvelle.
On doit encourager les liens d’amitié entre chrétiens et musulmans
pendant les cours et les activités récréatives. Tabora
reste une région à prédominance musulmane en Tanzanie,
bien qu’à cause des différentes attitudes face au style d’éducation
à l’occidental, les chrétiens soient majoritaires dans les écoles
et collèges. Il y a des rencontres entre musulmans et chrétiens
dans le dialogue de la vie quotidienne. Dans un monde qui n’est pas le meilleur,
une nouvelle génération a besoin de réconcilier, intellectuellement
et humainement, les défis des attentes sociales modernes, les valeurs
culturelles traditionnelles et les exigences de la foi religieuse. Par ailleurs,
chaque jour, je suis moi-même confronté aux questions et aux
exigences des étudiants. Ce n’est pas une génération
soumise ! Néanmoins, j’adore ça et j’espère qu’un peu
de mon amour pourra apporter espoir et lumière à cette génération
inquiète de son avenir.
William Crombie
M.Afr.
![]() |
![]() |
![]() |