Voix d'Afrique N°85.

Eglise

 

AFRIQUE, LÈVE-TOI !


Le dimanche 25 octobre dernier, prenait fin la Deuxième Assemblée Spéciale pour l’Afrique du Synode des Évêques. Il faudra attendre un certain nombre de mois pour avoir l’exhortation que le Pape doit publier au sujet de cette Assemblée. Pour le moment, on ne possède que le Message que les Pères du Synode ont adressé à l’Afrique et au monde. Nous reprenons ici quelques passages significatifs de ce Message.



Dans la présente Assemblée, nous nous sommes concentrés sur un thème d’une grande urgence pour l’Afrique : rendre présente la réconciliation, la justice et la paix dans un continent qui se trouve dans un crucial besoin de ces grâces et de ces vertus. » (2)

« L’Église en Afrique se doit d’être instrument de paix et de réconciliation, conformément au cœur du Christ, qui est notre paix et notre réconciliation. Et cela ne sera possible que dans la mesure où elle-même se réconcilie avec Dieu. » (8)

Nécessaire conversion au sein de toutes les structures de l’Église
Mgr Martin Happe (Nouakchot), P. Gérard Chabanon, Sup. Général, Mgr Claude Rault (Sahara)« Au niveau de nos différentes Conférences et Assemblées, nous nous mettons nous-mêmes au défi, en tant qu’Évêques, de travailler dans l’unité pour donner à nos nations respectives le modèle d’une institution nationale réconciliée, prêts à nous donner en artisans de paix et de réconciliation partout et quand le besoin sera là. » (18)
« Nos diocèses doivent se présenter comme des modèles de bonne gouvernance, de transparence et de bonne gestion financière. Nous devons continuer à lutter contre la pauvreté qui est l’obstacle majeur sur les chemins de la paix et de la réconciliation. » (19)

Appel à la Communauté Internationale
« Les problèmes de la réconciliation, de la justice et de la paix, nous amènent à retrouver notre humanité commune dans notre même dénominateur. Ce projet concerne tout le monde et requiert l’action commune. » (29)

Mgr Philip Naameh archevêque de Tamalé Ghana« Aux grandes puissances de ce monde, nous disons ceci : traitez l’Afrique avec respect et dignité. L’Afrique en appelle à un changement de l’ordre économique mondial, cause des structures injustes qui s’entassent sur elle. La récente turbulence dans le monde financier démontre qu’il est temps d’opérer des changements radicaux dans les règles du jeu. Mais ce serait une autre tragédie si ce réajustement devait viser les intérêts des riches au détriment des pauvres. La plupart des conflits, des guerres et des situations de pauvreté en Afrique proviennent essentiellement de ces structures injustes. » (32)

La Dette et les Multinationales
« Un ordre mondial juste et nouveau n’est pas seulement possible, mais nécessaire pour le bien de toute l’humanité. Un changement est nécessaire en ce qui concerne le poids de la dette pesant sur les nations pauvres, mortel pour leurs enfants. Les multinationales doivent arrêter la dévastation criminelle de l’environnement dans leur vorace exploitation des ressources naturelles. C’est une politique à courte vue qui fomente des guerres pour obtenir des gains rapides à partir du chaos, au prix des vies humaines et du sang répandu. N’y aurait-il personne dans leur rang qui soit capable et désireux d’arrêter ces crimes contre l’humanité? » (32)

Appel à l’Afrique
Evêques d'Afrique du Sud au généralatMaintenant, l’Afrique doit faire face au défi de procurer à ses enfants un niveau et des conditions de vie convenables. Au niveau politique, on enregistre du progrès dans l’intégration continentale. L’UA et les autres regroupements régionaux parfois en collaboration avec l’ONU, ont pris des initiatives pour régler des conflits et maintenir la paix en maintes situations de crise. Au front économique, l’Afrique a essayé d’élaborer un plan stratégique pour le développement, appelé NEPAD (Nouveau Partenariat Économique pour le Développement de l’Afrique). …

Le Synode encourage tous ces efforts, car ces structures établissent un lien évident entre l’indépendance économique de l’Afrique et le règne de la bonne gouvernance. Malheureusement, le nœud du problème, c’est que pour la plupart des nations africaines, ces splendides documents du NEPAD ne sont encore que lettre morte. Nous espérons cependant un certain progrès de gouvernance en Afrique. » (34)

Les dirigeants
Cardinal TurksonLe Synode s’attriste en remarquant que c’est la honte qui caractérise plus d’un pays africain. Nous pensons en particulier au cas lamentable de la Somalie empêtrée dans de violents conflits depuis près de deux décennies, avec des conséquences sur les nations avoisinantes. Nous n’oublions pas non plus la tragédie des millions de personnes dans la région des Grands Lacs et la durable crise au nord de l’Ouganda, au Sud Soudan, au Darfour, en Guinée Conakry, et en d’autres endroits. Les gouvernants de ces nations doivent prendre leur responsabilité de
vant leurs prestations génératrices de douleur.

En bien des cas, on se trouve devant la situation de soif du pouvoir et des richesses, au détriment du peuple et de la nation. Quel que soit le niveau de responsabilité attribuable aux intérêts étrangers, on ne peut nier une complicité honteuse et tragique des leaders locaux : des politiciens qui trahissent et mettent leur nation aux enchères, des hommes d’affaires éhontés qui se coalisent avec les multinationales voraces, des africains vendeurs et trafiquants d’armes qui spéculent sur les armes légères cause de la destruction de vies humaines, des agents locaux d’organisations internationales qui se font payer pour diffuser des idéologies nocives auxquelles ils n’adhèrent pas eux-mêmes. » (36)

Le temps est venu de changer
« Les conséquences néfastes de toutes ces menées ne sont cachées pour personnes : pauvreté, misère et maladie, des réfugiés dedans, dehors et outre-mer, recherche d’une meilleure vie qui conduit la fuite des cerveaux, migrations clandestines, trafics d’hommes, guerres, effusion de sang, souvent par personnes interposées, atrocité d’enfants soldats, l’indicible violence faite aux femmes. Comment peut-on être fier de régner sur un tel chaos ? Qu’est devenue la pudeur traditionnelle africaine ? Ce Synode le proclame haut et fort : le temps est venu de changer des habitudes pour l’amour du présent et des générations futures. » (37)

Dialogue avec les religions
5 Missionnaires d'Afrique au Synode« L’Assemblée a écouté beaucoup de Pères synodaux témoigner de leur succès sur les chemins du dialogue avec les musulmans. Ils ont attesté que ce dialogue se passe et que la collaboration est possible et souvent effective. » (40)
« Tout en encourageant cela, nous insistons pour dire que ce n’est pas assez. La liberté de religion inclut aussi la liberté de partager sa foi, de la proposer et non de l’imposer, d’accepter et d’accueillir des convertis. Les nations qui, de par la loi, interdisent à leurs citoyens d’embrasser la foi les privent de leur droit humain fondamental qui leur donne de choisir librement leur foi. Cela ne s’est passé que trop longtemps, et il est temps de revoir la situation sous l’angle du respect pour les droits fondamentaux de l’homme. Ce Synode avertit qu’une telle restriction des libertés empêche le dialogue sincère et porte entorse à une authentique collaboration. Puisque des chrétiens qui décident de changer de religion sont accueillis dans les rangs des musulmans, on doit pouvoir aboutir à la réciprocité dans cette affaire. » (41)

Afrique, lève-toi !
« On dit que le berceau de l’humanité se trouve quelque part en Afrique. Notre continent a une longue histoire de grands empires et de brillantes civilisations. Le futur du Continent est encore à écrire. Dieu nous a bénis de ressources humaines et naturelles considérables. Les indices internationaux pour mesurer le niveau du développement relèguent souvent l’Afrique en fin de liste, mais cela ne constitue pas une raison pour désespérer. Le passé montre de regrettables actes d’injustice historiques comme la traite des esclaves et la colonisation dont les conséquences négatives sont encore visibles. Mais celles-ci ne constituent aucune justification pour piétiner. » (34)

« L’Afrique n’est pas abandonnée. Notre destinée est encore entre nos mains. Tout ce qu’elle demande, c’est de disposer de l’espace pour respirer et s’épanouir. L’Afrique est en mouvement, et l’Église qui lui procure la lumière de l’Évangile, chemine avec elle. Les eaux ont beau être impétueuses, mais les yeux fixés sur le Seigneur Jésus, nous parviendrons sains et saufs au port de la réconciliation, de la justice et de la paix. »
(cf. Mt 14,28-32). (41)

Pour plus sur le Synode : documents


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