Cela pourrait être comme une dixième béatitude, après "Heureux les pauvres… heureux les doux… heureux les persécutés… " du sermon sur la montagne (Matthieu ch.5).

Les missionnaires d'Afrique en France ne sont pas des nostalgiques ! Ils ont une moyenne d'âge qui frise les 80 ans. La plupart de leurs représentants à l'Assemblée capitulaire de Mours (voir p.2) dépassaient largement l'âge de la retraite, et ils ont eu la naïveté de réfléchir, de discuter et de prier pendant cinq jours sur " notre mission " !

Après quarante ou cinquante ans passés à suer et peiner sur les chemins d'Afrique, à apprendre et découvrir ce continent, ses peuples et leurs cultures, à nouer des relations d'amitié, avec pour tout instrument l'Evangile et les dialectes africains, ils mériteraient de souffler un peu en égrenant les vieux souvenirs de la brousse. ! Eh bien non ! Les jambes sont moins fortes, les artères sont plus fragiles, mais le cœur est là, et bien là ! Car la mission est toujours une passion.

Les jeunes d'Europe ou d'Amérique sont rares à choisir de partir en Afrique. Certes, la relève est prometteuse parmi les Africains, et même les Indiens et les Latino-américains, mais nous aimerions bien voir nos neveux ou petits-neveux prendre la relève. On n'en perd pas pour autant l'enthousiasme, l'Assemblée de Mours en était la preuve.

Il faut vraiment être naïfs pour croire encore à "la Mission". C'est que les missionnaires sont des rêveurs. Au cours de nos partages sur le dernier chapitre, la parole du vieil évêque brésilien, Don Helder Camara, revenait souvent : " Quand on est seul à rêver, ce n'est qu'un rêve ; quand on est avec les frères, c'est un projet ! " Quand on est ensemble, la naïveté est une béatitude, une espérance plus forte que tout, une aurore merveilleuse .

C'est la naïveté du Nazaréen, qui lançait dans le monde, il y a deux mille ans, une bande de pêcheurs galiléens presque incultes. C'est cette naïveté qui donnait à Pierre la force de prendre par la main le mendiant paralytique à la porte du temple et de le mettre debout : "Je n'ai ni or ni argent à te donner, mais ce que j'ai, je te le donne : au nom de Jésus de Nazareth, lève-toi et marche !" C'est le rêve de Paul qui débarquait dans le monde grec, pour répondre à l'appel du Macédonien : "Viens à notre secours !" (Actes des Apôtres 16, 6 ss…).

Ce numéro de " Voix d'Afrique" le décrit, le rêve de Claude Rault, le nouvel évêque du Sahara, de Dieudonné, le jeune Congolais stagiaire à Ghardaïa, et de tous les missionnaires dans les dunes, la savane et les forêts d'Afrique.

Heureux êtes vous, vous les naïfs : le Royaume de Dieu est à vous !

Gérard Guirauden
Rédacteur en chef

ASSEMBLEE POST-CAPITULAIRE

Nous étions une vingtaine de missionnaires, envoyés des quatre coins de la France. Il s'agissait de relire ensemble les décisions de notre dernier "chapitre" pour les mettre en pratique en France. Le "chapitre", c'est un peu le parlement de la Société des Missionnaires d'Afrique. En France, la société des missionnaires donne des signes de déclin. Des maisons sont fermées, faute de personnel. La moyenne d'âge tourne aux environs de 70 ans.

Pendant cinq jours, nous avons travaillé dur, en petits ateliers et en assemblées générales, de 9h. à 12 h., et de 14.30 à 18h.

Voir aussi

Le samedi 29 nous célébrions la conclusion de l'assemblée par une célébration eucharistique présidée par le nouveau supérieur provincial, Louis Vernhet. Suivant la parabole de la semence jetée en terre et qui pousse obstinément, car "la terre donne la croissance", il engageait tous les missionnaires, quels que soient leur âge et leur condition physique, à continuer à jeter en terre la petite graine : elle est toujours semence du Royaume de Dieu.

"Notre Société missionnaire est bien petite, nos communautés bien fragiles ".

" Notre grand défi, c'est celui de croire, de continuer à jeter en terre la semence… d'être nous-mêmes, avec nos pauvretés, mais beaucoup d'espérance, des germes de paix, de pardon, de compassion, de rencontre, de joie, d'accueil… "