Voix d'Afrique N°80.....

Un jardin d’enfants : “Espérance”

 

Sœur Véronique Hégron est française. Entrée chez les Sœurs Missionnaires de Notre-Dame d’Afrique en mars 1999, elle a fait son postulat à Ouagadougou (Bukina Faso), et aussi son Noviciat. C’est là que, le quinze décembre 2OO1, elle a prononcé ses premiers voeux et reçu son envoi pour le Ghana.
Quelques mois d’études en Angleterre lui permet-tent de maîtriser l’anglais.
Elle pouvait alors découvrir le Ghana et Gumo, une communauté fourmillante de jeunes soeurs et postulantes, orientée vers l’animation et l’accompagnement des jeunes en recherche de vocation.
Elle s’attelle alors à découvrir le milieu et à apprendre la langue locale, le dagbani...
Et maintenant, elle est à pied d’oeuvre pour la Mission ! La voici envoyée aux enfants de Gumo. Ils sont très éveillés et actifs... pleins de vie. La bibliothèque a du succès. Ce sont surtout les enfants du primaire qui la fréquentent.
Etre envoyée, partir, être accueillie... C’est la vie missionnaire pour nous aussi.

Gumo est à 15 kilomètres de Tamale. Lorsque j’y suis arrivée, en septembre 2002, le jardin d’enfants ‘Espérance’, «Tamaha» en langue locale, n’en était qu’à ses premiers balbutiements. C’était la reconversion du projet de « Centre de ressources » commencé en particulier par Maricruz Torrès (mexicaine).

«Tamaha» a été créé avec l’accord des autorités du village. Depuis sa construction, début 2001, les bâtiments étaient utilisés le matin pour rassembler les jeunes enfants d’âge préscolaire. On voulait leur donner des rudiments d’anglais et quelques connaissances de base dans différents domaines. Ils formaient un seul groupe d’une trentaine. En septembre 2002, ils ont été partagés en deux groupes. Une postulante, Vinolia Ayivor (Ghanéenne), et notre jardinier, Idrissu, enseignaient, sans aucune formation préalable.

Les premiers mois, tout en apprenant la langue, j’ai essayé, une fois par semaine, de leur apporter quelques conseils de pédagogie, préparation de classe et organisation. Plus tard, j’ai passé du temps, dans la classe, avec eux. C’était une œuvre naissante, sans passé ; donc cela a été un défi pour moi. Malgré ma formation et mon expérience d’institutrice dans les classes primaires, je me suis sentie dépourvue pour ce niveau de mater-nelle. Et puis le système éducatif du Ghana est différent de celui de ma Bretagne natale !

La création d’une œuvre demande d’établir des contacts avec l’environnement, d’être en relation avec des œuvres du même type. Il faut un esprit d’initiative et de créativité, la capacité de se réajuster sans cesse, l’ouverture à la communauté, la confiance en soi… autant de bonnes qualités à découvrir et à développer ! Je me suis sentie, parfois, un peu dépassée par la tâche, ne sachant par quel bout prendre les choses et manquant d’organisation…
J’ai appris à avancer doucement, à accepter mes limites. J’ai trouvé un encouragement dans l’expérience de mes sœurs aînées dont beaucoup sont passées par ce même genre de situation.


Par les enfants, nous sommes en lien avec les familles

Des choix de fonctionnement
Une « œuvre à nous », c’est aussi, bien sûr, un investissement financier ; tout l’aspect matériel est entre les mains de notre congrégation. Mais nous avons pu voir que les amis, des connaissances et même parfois des gens inconnus, s’intéressent à notre œuvre, « l’œuvre des sœurs ». Ils font preuve de beaucoup de générosité par des dons en nature ou en espèces. En 2003, des lycéens ont organisé une collecte de matériel pour les enfants de Tamaha qu’ils avaient connus par Internet ! Je pense que les enfants sont aussi une population qui éveille l’intérêt des gens ; nous sommes par eux au service du futur d’un peuple.

Dans « l’œuvre à nous », les choix de fonctionnement in-ternes sont ouverts et permettent de refléter notre esprit de congrégation. A Tamaha, dans les relations avec les parents et les en-fants, par l’esprit de fraternité et de pardon que nous essayons de développer, c’est ma foi dans l’Amour du Christ que je désire partager, ma certitude que chacun est enfant de Dieu, habité de Sa présence, chargé de talents particuliers à développer. Dans le cas d’une école, nous avons libre choix des enseignants.

Comme nous avons la charge de cette œuvre, il nous est aussi plus facile de nous organiser, d’ajuster nos engagements aux autres appels de la mission : c’est ainsi que les dates d’ouverture et de fermeture sont parfois décalées ou qu’un enseignant est remplacé par une autre personne. Bien sûr, l’un des avantages est que cette œuvre est une « plate-forme de lancement » pour les plus jeunes. Elle le fut pour plusieurs postulantes comme elle l’avait été pour moi et je continue d’apprendre beaucoup de choses. Lorsque des aspirantes passent quelques jours chez nous, «l’œuvre à nous» leur permet de décou-vrir une façon de vivre notre charisme et d’y prendre part.

Toucher la population
Le fait que notre œuvre soit un jardin d’enfants, et qu’il se trouve juste à côté de chez nous, est un moyen privilégié pour toucher la population. Par les enfants, nous sommes en lien avec les familles. Nous pouvons transmettre des connaissances aux élèves, leur partager ce que nous savons, mais aussi les aider à grandir dans toutes les dimensions de leur être, les éveiller à la présence de Dieu et leur ap-prendre à vivre ensemble. Cette expérience du groupe est la première pour les plus petits.
L’éducation est une pierre de fondation dans la vie d’une personne. Ce qu’elle acquiert dès le plus jeune âge construit son être social, intellectuel, spirituel.


Aider les enfants à grandir dans toutes les dimensions
de leur être

C’est une œuvre de prévention aussi. Les jeunes éduqués s’enfuiront moins facilement dans des tentations destructrices, afin de gagner leur vie ou de lui donner un sens. Mais, avec l’expérience de trois années maintenant, cela devient une évidence pour moi que le jardin d’enfants devrait être suivi par un primaire solide.
Je trouve beaucoup de joie dans la mission qui m’est confiée : les enfants ont soif de connaître, de découvrir leurs talents ; nous grandissons, eux et moi, les uns par les autres !

Sœur Véronique Hégron
SMNDA


.............. Suite