NOTICES BIOGRAPHIQUES

Père Jean-Pierre Sibien

1917 - - 2017

...Jean-Pierre est né à Paris le 28 août 1927 dans une famille aisée qui lui prodigua une bonne éducation. Mais pendant les années de guerre il souffrit de sous-alimentation, ce qui l'a durablement marqué pour le reste de sa vie. Il commence ses études secondaires au Lycée Pasteur de Neuilly sur Seine et les termine à notre Petit séminaire de Bonnelles. De santé fragile, et affecté de céphalées chroniques, on lui déconseille alors d'entrevoir une vie missionnaire en Afrique. Il part faire son service militaire à Vannes tout en restant très attaché à sa vocation et demande à être admis à Kerlois, ce qui lui est refusé.

Mais il est tenace et va faire ses études de philosophie au séminaire d'Aix-en-Provence où il est très apprécié. De nouveau il exprime son désir de devenir Père Blanc, et en septembre 1952 il est admis au Noviciat de Maison-Carrée. Le Père Maître y dénote ses faiblesses physiques et psychologiques, mais sa piété et sa générosité le font admettre pour poursuivre sa formation à Thibar et Carthage. Les formateurs chargés de l'admettre au Serment sont partagés entre d'une part son manque d'envergure et sa santé délicate, et d'autre part sa générosité, sa docilité et sa piété. Finalement, il est admis au Serment qu'il prononce à Thibar le 26 juin 1956. Il reçoit l'ordination sacerdotale le 21 avril de l'année suivante.

Conscient de sa fragilité il demande à être nommé au Rwanda ou au Burundi. C'est ce dernier pays qui l'accueille dès le mois d'août 1957, et qui va devenir sa seconde patrie. Là encore, les supérieurs remarquent un état de fatigue chronique. Il se révèle incapable d'apprendre correctement le kirundi. Il en souffre, car cela l'empêche de recevoir rapidement la juridiction et donc d'exercer un ministère sacerdotal.

Après plusieurs essais en paroisse, il est nommé à Busiga où il enseigne au Petit séminaire, tout en travaillant comme vicaire dans la paroisse. Il met beaucoup d'ardeur et de persévérance dans l'apprentissage de la langue, et il arrive à se perfectionner et à se faire suffisamment comprendre des gens qui apprécient les homélies qu'il compose par écrit. Sa mauvaise santé continue à l'handicaper : il souffre de bronchite chronique et d'asthme. De plus il a mal aux pieds et la marche lui est pénible.

Toutefois, cela ne freine pas son zèle apostolique. Son esprit surnaturel, son dévouement et sa grande dévotion mariale le font apprécier, malgré sa tendance à être plutôt traditionnel. Il est nommé vicaire dans plusieurs paroisses comme Muhanga, Busiga, Karusi, Giteranyi, Murehe, Giheta. Il est très consciencieux dans son travail, presque scrupuleux. Il passe de longues périodes au confessionnal. En même temps, il continue à enseigner. Il aime beaucoup son travail dans le milieu scolaire et il y est bien apprécié. En 1981 il participe à la Session-retraite de Jérusalem. A son retour il est nommé Chancelier du diocèse de Gitega. C'est là que le 5 avril 1985, comme tous les missionnaires expatriés, il reçoit son "autorisation de sortir définitivement du Burundi".

Dès le mois de juin on lui propose une nomination à Bunia (R.D.C.) pour s'occuper de la comptabilité de la Région de l'Ituri, ainsi que de l'accueil et de l'économat de la Maison Régionale. La proposition le rejoint à Castelgondolfo, où il participe à une session de formation des Focolari. Généreusement, il accepte ce nouveau défi, et le 15 août de la même année, il arrive à Bunia. De nouveau il doit affronter sa difficulté à apprendre une nouvelle langue. Il commence par apprendre par cœur le "Je vous salue Marie" en swahili. Il écrit que sa première activité apostolique c'est la prière, ce qui pour lui se concrétise dans des heures de prière à la chapelle, où il intercède tout spécialement pour le Burundi. Il commence à répandre l' "Œuvre de Marie" (Focolari).

Sa santé ne s'améliore pas, mais il offre tout dans un esprit de renoncement et de sacrifice. Il passe les fins de semaine au Foyer de Charité de Muhito animé par le Père Jean-Claude Quennouëlle. Handicapé par son ignorance de la langue locale, il souffre de ne pas pouvoir être suffisamment engagé dans le ministère et il dit se trouver sur une voie de garage. Mais il y voit la volonté de Dieu.

Heureusement, en octobre 1988, il reçoit une lettre de Waly Neven, Régional du Burundi, qui l'invite à revenir au Burundi. Après un repos en France, il s'envole pour la paroisse de Jene, dans le diocèse de Ngozi. On lui demande aussi d'enseigner les Saintes Ecritures, les sacrements et la spiritualité aux novices des Bene-Maria. Il intervient aussi au noviciat des Sœurs Ouvrières de la Maison de Nazareth, et au Monastère des Sœurs Dominicaines de Rweza. De plus, il est souvent sollicité pour diverses retraites et récollections, et pour l'animation de groupes de Focolari. Pour éviter trop d'allers et venues, il s'installe à la paroisse de Nyamurenza.

C'est avec enthousiasme qu'il participe aux célébrations de la visite de Jean-Paul II en 1990. Pendant toutes ces années il a été fortement influencé par Pastori, un adolescent de 15 ans décédé en odeur de sainteté après une forte expérience spirituelle. Ce jeune homme prend une place de premier plan dans la vie spirituelle de Jean Pierre qui s'y réfère souvent dans sa correspondance. Après un congé pris en 1991, il rejoint le Burundi, avec sa valise de médicaments et s'installe à Rweza où il continue ses divers ministères d'enseignement de novices et d'animation spirituelle. En dépit de sa santé, et de ses crises de bronchites et d'asthme, il est parfaitement heureux. "Tout est grâce" écrit-il dans sa circulaire de Noël 1991.

Cela ne l'empêche pas de compatir de tout son cœur aux nombreuses tragédies que traverse alors son cher Burundi. Il en parle avec les larmes aux yeux et il s'efforce d'apporter de l'aide aux pauvres, aux blessés et aux handicapés dans la mesure de ses possibilités. Mais sa charité n'est pas toujours bien éclairée, et les confrères trouvent que ses dons ne sont pas toujours faits à bon escient. Mais Jean-Pierre refuse d'écouter.

Au début de janvier 1997, sa santé s'est tellement détériorée qu'il doit rentrer en France pour des examens médicaux approfondis. Avec le sourire il enchaine les consultations : dentiste, O.R.L., dermatologue, stomatologue, podologue, cardiologue…, et prépare son retour en mission. Mais il reçoit une lettre de son Régional qui l'invite à venir faire ses adieux au Burundi. C'est le cœur gros qu'il prend le chemin de Bujumbura, avec la ferme intention de négocier afin d'y rester encore quelques années. Mais il accepte docilement la décision, et au mois de juin il rentre définitivement en France.

Il a alors 70 ans. Après avoir passé une année sabbatique à Loppiano, (Centre des Focolari), il assume l'aumônerie du Carmel d'Aix-en-Provence. Ce Carmel ayant fermé en 2000, Jean-Pierre est nommé à la communauté de Toulouse comme accompagnateur des Amis des Pères Blancs. Deux ans plus tard, il part en Ardèche, à Aubenas, pour y assurer diverses aumôneries dont celle de la Congrégation de l'Institut Saint Joseph. Il vit alors en communauté avec un confrère, le Père Augustin de Clebsattel, ancien missionnaire de Tunisie. Tous les deux étant disciples de Chiara Lubich, ils vivent ensemble une vie fraternelle semi-contemplative. En 2005, ils sont tous les deux nommés à Bry-sur-Marne.

Il pense que c'est sa dernière nomination. Mais bientôt, la maison de Bry-sur-Marne doit subir de gros travaux, et un certain nombre de confrères doit être réparti dans diverses EPHAD de la région parisienne. C'est ainsi que Jean-Pierre va passer quelques années dans la communauté jésuite de Vanves, avant de revenir à Bry où il décède le 25 mars 2017.

Augustin de Clebsattel, son compagnon des quinze dernières années a pu décrire ainsi cette étape finale : " Jean Pierre affectionnait le silence et la contemplation, trouvant sa source dans les Ecritures. Il vivait "en terre abandonnée, sur la croix", comme il aimait le répéter, irradiant toujours paix et joie, jusqu'aux derniers instants de sa vie. Jean Pierre avait un amour profond de la Vierge. Son chapelet ne le quittait pas, et chaque jour il disait un chapelet spécial en kirundi pour le Burundi ".

Le jour de son jubilé Jean-Pierre résumait sa vie en écrivant : " Jésus m'a présenté sa croix très tôt comme le chemin du vrai bonheur, celui de l'Amour accueilli et aussitôt donné. Jésus abandonné est finalement devenu mon époux, source de saint abandon dans une vie vraiment missionnaire. C'est ainsi que la joie et l'action de grâce ne quittent jamais mon cœur avide d'apprendre encore à aimer. "

François Richard


 



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Father Jean-Pierre Sibien

1917 - - 2017

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