26 novembre 2004, 112e anniversaire de la mort de
Lavigerie
Le
Cardinal Lavigerie
et son projet pour
les Missionnaires d'Afrique
Notes pour un portrait
Il n'est pas facile de faire, en quelques lignes, le portrait du cardinal
Charles Lavigerie (31 octobre 1825 - 26 novembre 1892). Par son caractère
et les circonstances historiques qui furent les siennes (en France,
en Italie, en Afrique et dans l'Église), par le nombre et l'importance
des oeuvres qu'il entreprit, Lavigerie apparaît comme une personnalité
hors du commun.
Dès le premier contact, nous avons le sentiment d'être
devant une personne douée de nombreuses qualités, riches
et complexes, souvent même déroutantes. Charles Lavigerie
ne semble être à l'aise que devant de larges horizons,
mais il est aussi capable de s'attacher de façon presque tatillonne
aux moindres détails d'un projet déterminé, la
valeur des détails venant de la grandeur du projet qu'ils concrétisent.
En 1885, le Cardinal Lavigerie fait
exécuter une série de vitraux pour la chapelle de son
archevêché tunisien de La Marsa, près du siège
primatial de Carthage dont saint Cyprien, martyr par l'épée,
fut le plus illustre évêque. Lavigerie fait représenter
saint Cyprien sous ses propres traits. Ainsi il marque fortement qu'il
est l'initiateur de la restauration du titre de Primat d'Afrique par
le Pape Léon XIII.
Les études à Paris, l'enseignement à la Sorbonne
en 1854 et le travail de bureau en Rome 1861, constituent les premières
tâches du futur cardinal. Elles l'étouffent. Le gouvernement
pastoral du diocèse de Nancy, en France (1863-66), n'utilise
pas toutes ses capacités d'action et ne peut satisfaire son dynamisme
créateur, malgré les nombreuses initiatives et réformes
qu'il y entreprend, tant dans le domaine de l'enseignement catholique
que dans celui de la formation du clergé et de la vie religieuse.
La chapelle du vitrail Lavigerie à
La Marsa, est en voie de restauration. Mgr Dominique Rézeau,
vicaire général du diocèse de Tunis, s'en occupe.
Email: domy2@yahoo.com
Mis en contact, dès ses dernières années de formation,
avec l'aile la plus ouverte et la plus réformatrice du clergé
parisien, qui voulait une Église plus autonome face à
Rome et plus ouverte face au monde moderne, Lavigerie gardera toute
sa vie une tendance à tout repenser, tout réformer, enraciné
cependant dans la sagesse de l'Église ancienne qu'il avait saisie
durant ses études spécialisées en histoire. Plus
tard, son expérience des hommes et des situations le rendra plus
exigeant quant à la nécessité d'une union à
tout épreuve avec le successeur de Pierre.
Des tâches importantes comme, en 1856, celle de l'Oeuvre des
Écoles d'Orient à un moment tragique de leur histoire,
lui permirent de déployer ses capacités de cur et
d'organisation. Sa véritable chance historique fut cependant
son acceptation du siège d'Alger en 1866. C'était un diocèse
difficile mais en quelque sorte vierge, où tout, ou presque tout,
était à faire tant au point de vue du développement
humain qu'à celui de l'évangélisation. Mais surtout,
Alger était pour lui une porte ouverte sur un continent immense
où il pourra pleinement déployer son dynamisme créateur
et manifester son caractère de chef.
Instructions aux Missionnaires, édition
de 1950, Namur, Belgique. Il y a eu plusieurs éditions françaises
des Instructions du Cardinal aux Missionnaires d'Afrique, mais aucune
en anglais
Si le cardinal Lavigerie était un homme d'action et de réflexion,
il était surtout un apôtre et par conséquent un
homme de Dieu: qualités difficiles à harmoniser dans la
vie concrète d'une seule personne. Nous les découvrons
cependant chez lui, ce qui peut donner parfois l'impression d'une certaine
ambiguïté dans sa pensée ou dans son comportement.
Les options concrètes en politique, en économie et dans
la pratique du gouvernement, propres de l'homme d'action, exigent souvent
des qualités qui font appel à la diplomatie avec ses compromissions.
Aussi, nous avons l'impression parfois de trouver chez lui des options
contradictoires, des changements imprévus, des procédés
plus ou moins acceptables et qui s'articulent mal avec une pensée
et des attitudes plus spirituelles, plus transparentes, plus simples
et plus libres.
Le Cardinal, nous l'avons dit, n'est pas d'abord un penseur mais un
homme d'action et un apôtre. Sa pensée se trouvera, certes,
dans ses écrits et ses discours mais davantage dans ce qu'il
fait lui-même et dans les directives pratiques qu'il donne. Son
originalité n'est pas à chercher dans des exposés
doctrinaux - sa théologie est en général celle
de son époque - mais dans la façon originale qu'il aura
d'aborder les question, souvent problématiques en son temps,
et de leur trouver une solution.
À plus forte raison, c'est dans ses actes que nous devons deviner
ses sentiments envers Dieu et ceux et celles qui partagent sa vision
et ses projets. Il est bien sobre dans ce domaine. Cherchait-il à
se protéger de ses propres élans de cur ? Il possède
une personnalité forte et un caractère de chef. Il est
habitué à la lutte et il vise l'efficacité dans
l'action. Malgré cela on sent chez lui, surtout dans ses lettres
personnelles aux confrères et dans ses causeries aux Surs
Missionnaires de Notre-Dame d'Afrique, un homme de cur muni d'une
riche et fine sensibilité, préoccupé qu'il est
de tous et de chacun.
Ces qualités de cur et son tempérament de chef,
sont la source d'un autre foyer de tensions (contradictions) concrètes
dans sa vie, repérables pour qui le connaît de près
: des paroles sévères et des décisions rudes côtoient
facilement des attitudes et des gestes vraiment humbles et paternels.
Des moments de grand courage et d'audace sont parfois suivis de moments
de pessimisme, voire de découragement. Ses grands discours et
ses plaidoiries brillantes - qu'il savait si bien faire - sont à
la fois des modèles d'art oratoire du XIXe siècle et des
témoignages de vie, pleins de vérité personnelle
et d'authentique chaleur humaine surtout en faveur des petits et des
pauvres.
On le dirait à la recherche d'honneurs, de pouvoir et d'argent.
Jamais cependant, on ne pourra l'accuser de les chercher pour lui-même,
mais pour ses oeuvres et pour sa mission, qu'il identifie volontiers,
il est vrai, avec l'uvre et la mission de l'Église.
Dans sa pensée il établit un lien extrêmement fort
entre Dieu, l'Église et le Pasteur qu'il est lui-même.
Aussi, dans la pratique, on trouvera dans ses directives ou dans son
comportement des court-circuits entre ces différents niveaux.
Il passera facilement d'un niveau à l'autre, surtout quand des
questions d'honneur ou d'autorité seront en jeu.
Homme de son temps, il professe une théologie qui identifie facilement
l'Évangile et l'Église, et celle-ci avec la hiérarchie
qu'il incarne et représente. De même, il associe facilement
évangélisation, développement humain et culture
occidentale, dont la meilleure expression à ses yeux était
l'authentique culture française.
En conclusion, nous pouvons affirmer qu'il ressort de l'ensemble de
sa vie et de son uvre, une belle image de Lavigerie. Il apparaît
comme un grand homme et un grand apôtre. Il s'est vu mêlé,
ou il s'est mêlé volontiers lui-même, à toutes
les questions importantes de l'Église et de la France de son
époque. Les Pères Blancs et les Surs Blanches ne
constituent qu'une partie de ses oeuvres, mais celle qui a le plus duré
et celle qu'il a le plus aimée.
'Vent d'avenir,
Le Cardinal Lavigerie', par le Père Joseph Perrier, publié
en 1992,
a été traduit en anglais (1993), en portugais au Brésil
(1995) et en polonais (1996).
Son projet missionnaire
Quelle est l'intuition de base qui a donné naissance à
la famille missionnaire des Pères Blancs - Surs Blanches
qui trouve son origine en Lavigerie ? J'ai dit la famille missionnaire
car, même si dès le début il s'agit de deux Instituts
autonomes et indépendants, ils sont nés tous les deux
d'un unique projet apostolique, et à partir d'une intuition identique.
Le Cardinal s'adressait aux missionnaires, Pères et Frères,
par des instructions, des lettres, des sermons. Les mêmes idées,
sinon les mêmes textes, sont cependant adressées aux Surs
missionnaires. Elles se sont aussi reconnues dans les textes destinés
aux Pères et Frères. C'est pourquoi, avec les adaptations
nécessaires, ce qui est valable pour les uns, l'est aussi pour
les autres.
À partir des écrits du Cardinal recueillis dans ses Instructions
aux Missionnaires, l'essentiel du charisme de la Société
pourrait s'exprimer ainsi : un groupe d'apôtres consacrés
totalement - vie et travail - à Dieu pour la Mission en faveur
de l'Afrique, vivant en communautés fraternelles selon un style
propre fait de disponibilité totale, de simplicité de
vie et de proximité aux gens.
Aussi la spécificité de nos deux Instituts missionnaires
est constituée par l'ensemble de ces notes dans lequel nous trouvons,
: 1. un élément géographique et humain : l'Afrique
en tant que " continent " présent dans le monde entier
. 2. Un secteur spécifique dans la mission globale de l'Église
qui se situe " à ses frontières " et se concrétise
dans des activités de rencontre, de témoignage et de dialogue
avec les cultures et les religions du monde africain en vue de l'évangélisation
soit par la première annonce, soit par la création et
la consolidation des communautés chrétiennes et par les
services temporaires de suppléance pour répondre à
des besoins que les Églises locales ne sont pas encore en mesure
d'assumer . 3. Un esprit propre découlant des accents spirituels
particuliers que le Fondateur a voulu pour ses Missionnaires et des
consignes pratiques pour la vie et l'apostolat. À ceci s'ajoutent
les éléments de l'expérience de vie et de travail
apostolique que la Société a fait siens au long de son
histoire.
La Société des Missionnaires d'Afrique et la Congrégation
des Surs Missionnaires de Notre-Dame d'Afrique n'ont pas à
être " re-inventées " aujourd'hui, ni dans leur
champ d'apostolat, ni dans leurs tâches fondamentales, ni dans
leur esprit. Leurs éléments fondamentaux sont encore valables.
Notre tâche est de prendre conscience en communauté de
ces richesses, de nous mesurer à elles, et de nous ajuster aux
circonstances et aux possibilités du moment.
En suivant l'ordre de ces idées, voici quelques textes du Cardinal
qui visent à réveiller notre mémoire.
1. Missionnaires
" Mes chers enfants, vous n'êtes pas des explorateurs ; vous
n'êtes pas des voyageurs ordinaires
Vous êtes des
apôtres, vous n'êtes que cela ; ou, tout au moins, le reste
ne doit venir que par surcroît. " (Instructions aux Missionnaires,
édition de 1950, p. 121)
Les tâches missionnaires sont variées et les activités
nombreuses. Pour le Cardinal, cependant, il y a entre elles une hiérarchie
bien précise. Si les missionnaires doivent s'adonner à
beaucoup d'activités, ils ne devront jamais oublier qu'ils sont
des apôtres et rien que des apôtres; c'est-à-dire,
qu'ils sont des hommes (des femmes) de Dieu, donnés à
Lui sans réserve. Les missionnaires consacrent leur vie et leur
travail à Dieu pour la Mission.
On doit comprendre dans cette ligne l'importance que le Cardinal donne
à ce que l'on appelait à l'époque: les exercices
de piété. Ils avaient la priorité sur toute autre
chose. Par la fidélité à ces pratiques de prière,
le Cardinal visait, non pas tant l'observance de la Règle, -
très importante cependant à ses yeux - mais la relation
des missionnaires à Dieu.
" Je n'entrerai pas ici dans le détail de votre conduite
spirituelle; la nature de ces instructions ne le comporte pas. Mais
je vous dirai un mot qui comprendra tout: c'est que vous devez tenir
avec un fidélité inviolable à garder, non seulement
l'esprit, mais encore la lettre de vos règles. Vous devez en
particulier chercher à n'omettre jamais, quelques que soient
les difficultés et les embarras, vos exercices de piété...
" (p. 65)
" Mes chers enfants, c'est maintenant qu'il vous faut une plus
grande fidélité à vos exercices de piété.
Si vous avez le malheur de perdre l'esprit de foi, si vous vous laissez
aller à ne plus agir que comme des explorateurs ou de voyageurs
ordinaires, vous vous perdriez certainement... Vous êtes en danger
de vous perdre, si vous ne faites passer en tête de toutes vos
préoccupations les moyens pratiques d'entretenir et d'augmenter
en vous la vie spirituelle... Que l'oraison, l'examen particulier, la
lecture spirituelle ne soient jamais omis, lorsqu'on n'est point en
voyage; et qu'en voyage même, lorsqu'on ne peut tout faire, l'on
supplée de son mieux à ce que l'on est contraint d'omettre.
" (p. 138-139)
Pour les missionnaires, leur consécration totale à Dieu
s'exprimera par leur disponibilité parfaite - la mort incluse,
si nécessaire -, au service de la Mission, étant donné
que l'objet de celle-ci est la gloire de Dieu: Dieu connu, aimé
et honoré comme il convient.
" Vous savez ce que j'ai écrit, comme la devise future
de votre Oeuvre, sur les Lettres testimoniales que me présentait
l'un d'entre vous, à son arrivée à Alger... Je
les pris et sans rien dire, j'écrivis, au lieu de la formule
ordinaire, celle-ci: 'Visum pro martyrio '. Puis, je lui rendis ses
Lettres en lui disant: 'Lisez, acceptez-vous? - C'est pour cela que
je suis venu', me dit-il simplement. " (p. 41-42)
'Histoire des Origines la Congrégation
des Surs de Notre-Dame d'Afrique' par Sur Marie-André
du Sacré-Cur. Ce livre (1946) donne une description respectueuse
et contrastée des relations souvent difficiles entre le Cardinal
fondateur et 'Vénéré Père', et sa 'merveilleuse'
et 'fidèle' fille à la vertu plus qu'ordinaire, pilier
de la fondation et Supérieure Générale des Surs
Blanches, la Vénérée Mère Marie-Salomé.
2. En faveur du monde africain
" Je veux, mes très chers fils, vous faire trois recommandations
qui me paraissent toutes trois nécessaires pour le succès
et la conservation de vos uvres : la première c'est que
vous ne perdiez jamais de vue le caractère et l'esprit propre
de votre Société. Elle a, en effet, un but spécial
dont elle ne saurait s'écarter sans perdre absolument sa raison
d'être. Elle est destinée aux infidèles de l'Afrique.
Elle ne peut et ne doit rien entreprendre qui n'ait cette fin pour objet
(
). Laissez les autres congrégations suivre leur voie,
elles y font mieux que vous ne feriez vous-mêmes, n'envahissez
pas leur domaine et garder fidèlement la petite portion du champ
que le Père de famille vous a chargé de cultiver "
(p 52.)
La mission confiée par Jésus à l'Église
s'étend au monde entier (Mt. 28, 18-20). Pour la réalisation
de cette tâche, cependant, y a des charismes particuliers et différents
distribués par l'Esprit (I Cor. 12,4-11. 27-30), répondant
habituellement aux besoins ressentis dans le monde ou dans l'Église.
Le charisme des Missionnaires d'Afrique est profondément marqué,
comme leur nom l'indique, par la référence africaine,
aux peuples d'Afrique. Lavigerie voulait qu'on y reste vraiment fidèle.
Non seulement l'Afrique était le lieu de naissance de la Société,
mais l'activité des missionnaires devait s'adresser aux Africains
en vue de les conduire à la foi. Les autres activités,
lieux ou personnes avec qui les missionnaires auraient à faire,
devaient être vues dans cette optique ou laissées à
d'autres apôtres.
Déjà en 1873, le Cardinal mettait en garde les premiers
missionnaires, installés en Kabylie, contre leurs rencontres
à ses yeux trop répétées avec des non-Africains.
Il le leur interdisait même, afin de protéger la vocation
missionnaire et africaine du groupe naissant.
"Mes chers enfants, d'après ce qui me revient et ce que
vous me dites vous-mêmes, je crains que vous ne vous lanciez un
peu trop dans les oeuvres paroissiales au détriment de l'uvre
arabe et en particulier que vous ne voyiez un peu trop le monde, les
officiers. Vous perdrez votre vocation à ce jeu dangereux."
(p. 30)
Mère Marie-Salomé (Renée
Roudaut), née en Bretagne, France, en 1847 et décédée
à Alger le 18 octobre 1930.
|
Le Cardinal Lavigerie, né au Pays basque,
France, le 31 octobre 1825 et décédé à
Alger le 26 novembre 1892.
|
3. En communautés fraternelles
" Ma dernière recommandation, mes chers fils, la plus importante
des trois, celle sans laquelle toutes les autres seraient inutiles,
c'est la recommandation du vieil apôtre d'Éphèse
: 'Filioli diligete invicem'. Aimez-vous les uns les autres. Restez
unis, unis de cur, unis de pensées. Formez véritablement
une seule famille, ayez fortement dans le sens chrétien et apostolique
de ce mot, l'esprit de corps. Défendez-vous, soutenez-vous, aidez-vous
toujours les uns les autres. Que la discorde ne pénètre
jamais parmi vous ; que vous soyez, sans cesse, prêts à
défendre réciproquement comme un seul homme, contre tous
les adversaires du dehors, vos personnes, en un mot que vous soyez non
pas seulement unis, mais un. " (p. 53)
Pour la vie de communauté, le Cardinal insiste sur deux aspects
différents mais profondément unis entre eux : d'une part,
l'observance des Règles, concrétisée dans l'obéissance
aux supérieurs, et d'autre part, la charité fraternelle.
Chacun de ces aspects a ses caractéristiques propres, mais ils
doivent aller ensemble et doivent être considérés
toujours en fonction de la Mission. L'obéissance sauvegarde l'ossature
de la communauté et la charité fraternelle en constitue
le cur.
Par rapport à cette dernière, en novembre 1874, avant
de confier le gouvernement de la Société entre les mains
du Conseil Général, le Cardinal fait savoir aux missionnaires
en quoi consiste l'esprit de l'Institut. Il le fait en leur donnant
trois recommandations fondamentales: celle de la fidélité
à l'Afrique (voir plus haut), celle de la prudence, de la patience,
de la charité dans l'exercice du zèle apostolique, et
de l'amour fraternel englobant une internationalité réelle.
" Vous avez été jusqu'ici, sous mon autorité
paternelle, réunis dans un seul sentiment et ne formant qu'un
seul cur. C'est la loi que je vous ai donnée: j'ai déclaré
que je ne garderais point un seul d'entre vous qui n'entourerait pas
du même amour tous le membres de la Société, à
quelque nation qu'ils appartiennent. Vous conserverez, plus encore si
possible, cet attachement fraternel, dans les périls, dans les
fatigues, dans la mort. Mon ambition est qu'en parlant de votre petite
Société qui est, par son origine, la plus humble et la
dernière venue des Sociétés d'apostolat, on dise
d'elle, du moins, qu'elle est 'catholique' par excellence. " (p.
260)
4. En disponibilité totale
" Je ne puis m'empêcher de me poser sur votre Société
naissante une question redoutable: sera-t-elle une Société
d'hommes vraiment obéissants? Je l'espère de la miséricorde
de Dieu et de votre bonne volonté qui m'est connue, et, dans
ce cas j'espère qu'elle sera vraiment utile aux âmes et
à la conversion de cet immense continent auquel elle est envoyée.
Mais s'il en devait être autrement, si l'orgueil, si l'amour-propre,
si l'esprit de révolte devaient régner jamais parmi vous,
hélas! vous marcheriez à la mort et pour vous et pour
les autres, et mieux vaudrait, cent fois, que vous n'eussiez jamais
existé... " (p. 59)
Le Cardinal est un apôtre et un homme pratique. Il a un caractère
de chef qui sait commander et qui veut être obéi. Il aime
l'ordre et la discipline. Mais cela n'explique pas tout dans ses instructions
et directives. Il a aussi, et surtout, une vive conscience des exigences
que demande une vraie consécration à Dieu. Celle-ci sera
vue par lui non pas en soi mais en fonction de l'apostolat. D'un apostolat
coordonné puisqu'il s'agit d'un groupe d'apôtres. C'est
donc sur l'observance des Règles et sur l'obéissance aux
supérieurs que le Fondateur insistera. Il mettra en relief leur
valeur profonde pour la Mission.
Ainsi, l'obéissance parfaite est exigée comme expression
de don total de soi à Dieu et comme condition indispensable pour
la réussite de la Mission. Le Cardinal sait que " celui
qui refuse à Dieu ou à ceux qui le représentent,
son obéissance, se refuse en réalité lui-même,
en refusant de donner sa volonté. Et qu'importe alors tout le
reste ". Lavigerie demandera la fidélité la plus
stricte, riche d'une valeur sacrée. À ses yeux, la consécration
à Dieu pour la Mission passe par une disponibilité totale
sous le signe de l'obéissance. C'est pourquoi il fera mettre
comme complément aux Règles, qu'il écrit pour les
missionnaires, la lettre de saint Ignace sur l'obéissance. L'exigence
d'obéissance totale est d'autant plus indispensable que les missionnaires
se trouveront dans des circonstances tout à fait particulières.
La négligence ou le relâchement dans ce domaine peuvent
détruire la Mission, et c'est la plus grave faute qu'un apôtre
puisse commettre.
Aussi, en mars 1878, aux premiers missionnaires qui partaient pour
l'Afrique équatoriale, il écrit : " Vous devez garder
comme une sorte de sacrilège tout manquement d'obéissance
vis-à-vis de vos supérieurs: que ce mot de sacrilège
ne vous étonne pas, le défaut d'obéissance parfaite
dans les circonstances où vous allez vous trouver, entourés
comme vous le serez, d'obstacles, de tentations et de périls,
serait la ruine de la Mission. Et tuer la Mission, pour un missionnaire
qui est chargé par Dieu de l'établir, c'est, je ne crains
pas de répéter ce mot, quelque terrible qu'il soit, pour
le fixer dans votre esprit, un sacrilège véritable et
sans contredit le plus grand des crimes qu'il puisse commettre... "
(p. 65)
L'uvre historique
de François Renault Le Cardinal Lavigerie, L'Église, L'Afrique
et la France (1992) a été traduite (1994) dans un anglais
remarqué par le Père John O'Donohue sous le titre Cardinal
Lavigerie, Churchman, Prophet and Missionary
5. En simplicité de vie
Faisant allusion à la lettre d'un missionnaire qui lui écrivait
: " Je manque de tout, et cependant je ne changerais mon sort avec
celui d'aucun roi de la terre ! ", Lavigerie écrit : "
Que Dieu dans sa bonté, vous conserve toujours cet esprit de
généreuse allégresse
Qu'il vous y fasse trouver
la force de sacrifier tout et vous-mêmes pour le salut de ces
pauvres âmes auxquelles il vous envoie. C'est la loi de l'apostolat
:' omnia impendam et superimpendar ipse pro animabus vestris'. Faites
de ces paroles la réalité de votre vie. " (p. 42)
Le Cardinal connaissait la valeur de l'argent. Il avait été
chargé de nombreuses uvres d'apostolat et il s'était
engagé lui-même dans beaucoup de projets qui demandaient
des sommes d'argent énormes. Il avait dû quêter souvent
pour l'Oeuvre des Écoles d'Orient, pour les orphelins et les
victimes de la famine, pour ses Instituts missionnaires, pour de nombreuses
constructions, pour l'envoi de caravanes en Afrique équatoriale,
pour la campagne antiesclavagiste, etc. Il s'était vu obligé
d'arrêter ou de limiter plusieurs de ses projets à cause
du manque de moyens économiques. Même ses Instituts missionnaires
avaient vu leur existence mis en péril à cause des mêmes
raisons. Aussi, sait-il ce qu'il dit quand il demande aux missionnaires
une vraie pauvreté de vie.
Sur cette question, Lavigerie aurait pu puiser dans la littérature
spirituelle et présenter aux missionnaires les motivations traditionnelles
pour la pratique de la pauvreté, mais il préfère
présenter les siennes. Celles-ci sont des motivations apostoliques,
à savoir: la vie et la survie de la mission. Il osera dire que
les missionnaires " doivent pratiquer cette vertu toute apostolique
plus strictement que des religieux " . " Votre règle
est de vivre comme les indigènes et la Mission tombera bientôt
si vous ne le faites pas... Vous travaillez ainsi à détruire
l'Oeuvre dans un avenir prochain. Elle ne peut subsister en effet que
par la pauvreté et l'assimilation avec les indigènes au
point de vue de la nourriture et du matériel. " (Instr.
p. 35) " L'argent inutilement dépensé est autant
d'enlevé aux oeuvres de la Mission, et par conséquent
au rachat des âmes. " (Règles de 1872, p. 17)
De plus, les ressources viennent des aumônes des pauvres : "
Les missionnaires se souviendront qu'ils vivent d'aumônes, et
que le pain qu'ils mangent leur est donné par de pauvres catholiques
qui prennent pour cela sur leur nécessaire. " (Règles
de 1872, p. 15)
Et finalement, les missionnaires doivent imiter Jésus-Christ
: " Dans toutes ces choses, les missionnaires seront heureux d'être
traités mieux encore que notre Seigneur Jésus-Christ ne
l'a été, car c'est de la vie des plus pauvres Arabes qu'il
a vécu. " (Règles de 1872, p. 14)
Le Cardinal Lavigerie a souvent exprimé
sa pensée en commandant des uvres d'art (peintures, fresques,
statues) aux artistes connus en son temps. Ici, en 1869, le peintre
Dubois a suivi les indications du fondateur (représenté
à droite, en dessous du Vénérable Géronimo,
un martyr arabe). Sa famille missionnaire comprendra les Surs,
les Frères (alors en burnous noir) et les Pères. La Vierge
Marie semble leur parler " Quoi qu'il vous dise, faites-le. "
(Jean 5,11). Et ce que dit le Seigneur Jésus aux missionnaires,
c'est écrit : " Je suis la lumière du monde. Allez
enseigner toutes les nations. " (Jean 8,12; Matthieu 28,19-20).
Le motif de cette peinture sera repris par le peintre Lazerges, en 1879,
avec des adaptations à l'histoire de nos Instituts, dans la chapelle
de la maison mère de Maison-Carrée. ('Les Origines de
la Société', J. Mercui, pp. 291-292, et 'Histoires des
Origines', S. M.-André du S.-C., pp. 32-33)
6. Proches des gens du milieu
La Société que Lavigerie a fondée a " un caractère
particulier. Ce caractère, c'est de se rapprocher des indigènes
par toutes les habitudes extérieures, par le langage d'abord,
par le vêtement, par la nourriture, conformément à
l'exemple de l'Apôtre : 'Omnibus omnia factus sum ut omnes facerem
salvos'. " (Instr. p. 52)
La simplicité de vie ou la pauvreté était déjà,
aux yeux du Cardinal, une façon de vivre la proximité
des gens. Il y a cependant pour lui un autre motif à cette attitude
fondamentale: l'efficacité apostolique.
Depuis longtemps, l'Occident a crû à la supériorité
de sa culture face à celles des autres. Le cardinal Lavigerie
partageait probablement cette même conviction, mais jusqu'à
un certain point seulement, c'est-à-dire avec des nuances importantes.
D'une part par exemple, il était persuadé des richesses
culturelles et religieuses de l'Orient et d'autre part, il savait qu'une
des causes profondes des difficultés entre l'Orient et l'Occident
était précisément la prétendue supériorité
culturelle de celui-ci et sa tendance à imposer aux autres ses
formes de penser et de s'exprimer. En plus, il a constaté que
la difficulté de faire pénétrer dans les esprits
les valeurs de la foi vient souvent du fait que celle-ci est présentée
sous les formes d'une culture étrangère. Il faut donc
savoir bien distinguer entre foi et culture, entre morale chrétienne
et les coutumes propres à chaque peuple.
Dans la pensée du Cardinal, les idées sont claires, le
discernement pratique sera plus difficile. Il n'était pas aisé
pour lui, et il ne l'est pas encore aujourd'hui pour nous, de bien distinguer
parmi les caractéristiques d'un peuple les éléments
à garder et ceux qui devraient changer. Mais, affirmer les principes
est déjà un énorme avantage. Aussi Lavigerie, veut
un groupe d'apôtres immergés dans la culture du peuple
au milieu duquel ils travailleront: habitat, nourriture, langue, habits,
coutumes... tout ce qui ne soit pas contraire à la foi et à
la morale chrétienne doit être adopté par les missionnaires
et ils devront veiller à ce que les gens restent fidèles
à leur propre culture. C'est ainsi seulement que la foi prendra
des racines profondes et que les nouveaux chrétiens pourront
devenir des apôtres valables parmi leurs propres frères.
Les écrits du Cardinal dans ce domaine sont très nombreux.
Dans un texte fondamental, et parmi les plus connus, en partie déjà
repris plus haut, Lavigerie écrit:
"La première (de mes recommandations) c'est que vous ne
perdiez jamais de vue le caractère et l'esprit propres de votre
Société. Elle a, en effet, un but spécial dont
elle ne saurait s'écarter sans perdre absolument sa raison d'être.
Elle est destinée aux infidèles de l'Afrique. Elle ne
peut et ne doit rien entreprendre qui n'ait cette fin pour objet. Et,
non seulement elle a ce but spécial, mais elle doit l'atteindre
par des moyens spéciaux qui donnent à son action un caractère
particulier. Ce caractère c'est de se rapprocher des indigènes
par toutes les habitudes extérieures, par le langage d'abord,
par le vêtement, par la nourriture, conformément à
l'exemple de l'Apôtre: 'Omnibus omnia factus sum ut omnes facerem
salvos '.
Sachez donc que toutes les fois que, par un esprit déraisonnable
d'innovation, vous vous écarterez de ces deux points, vous détruirez,
autant qu'il est en vous, la raison d'être de votre Société.
Ce n'est, en effet, que pour pourvoir à ce grand besoin des pauvres
âmes de l'Afrique, et pour y pourvoir par ce moyen que vous avez
été fondés. " (p. 52)
L'efficacité apostolique est une raison fondamentale pour le
Cardinal de se rendre proche des gens, mais au cur de l'apostolat,
il donne la première place à l'amour (la " Charitas
" de ses armoiries) pour Dieu, évidemment, mais aussi pour
les gens. Proximité par motif d'efficacité, mais proximité
et efficacité par amour :
" J'ai pris moi-même pour devise: l'amour, l'amour de Dieu
et celui de tant de pauvres âmes abandonnées. Cet amour
m'a soutenu, au milieu des difficultés et des travaux qui ont
usé ma vie avant l'heure. C'est aussi lui qui vous donnera la
force, l'abnégation héroïque, la persévérance
nécessaire pour retirer, peu à peu, de la mort les peuples
auxquels vous êtes envoyés.
Aimez-les donc comme une mère aime ses fils, en proportion de
leur misère et de leur faiblesse. Aimez l'Afrique qui est loin
de nous, pour les plaies sanglantes de son esclavage, pour les cris
de douleur qui s'élèvent, depuis tant de siècles,
de ses profondeurs; l'Afrique qui est plus voisine et qui a été
chrétienne autrefois, pour ses infortunes passées, pour
ses grands hommes, pour ses saints.
Aimez, quoi que vous en ayez souffert, quoi que vous en puissiez souffrir
encore... Aimez-la avec ses souvenir, ses légendes, ses traditions
de respect et de foi, la résignation stoïque qui l'immobilise
dans son sépulcre...
Les Patriarches ont aimé jusqu'aux pierres de Sion, symbole pour
eux de tant d'espérances... À leur exemple, j'ai tout
aimé dans notre Afrique: son passé, son avenir, ses montagnes,
son ciel pur, son soleil, les grandes lignes de ses déserts,
les flots d'azur qui la baignent...
Puisse ma voix se faire entendre de vous! Elle se taira bientôt
dans ce monde, mais du fond de la tombe elle vous tiendra les mêmes
discours qu'elle vous tient depuis tant d'années... " (p.
210)
Jesús Salas
Rome
26th November 2004 : 112th Anniversary of Lavigerie's
death
Cardinal
Lavigerie:
Design for the
Missionaries of Africa
Notes for a portrait
It is not easy to sketch a portrait of Charles Cardinal Lavigerie (31st
October 1825-26th November 1892) in a few lines.
Given his character and the historical circumstances of his time, (in
France, Italy, Africa and in the Church), as well as the number and
the significance of the undertakings he embarked upon, Lavigerie emerges
as an out of the ordinary personality.
From the outset, we have the impression of being in the presence of
a person endowed with many powerful, complex, and indeed often disconcerting
qualities. Charles Lavigerie seemed at ease only when faced with broad
horizons, but he was also capable of fixating in a pernickety way on
the tiniest details of a given project, details arising from the grand
scale of the projects they embodied.
In 1885, Cardinal Lavigerie commissioned
a series of stained-glass windows for the chapel of his Tunisian Archdiocesan
Offices in La Marsa near the Primatial See of Carthage where Saint Cyprian,
martyred by the sword, had been the most illustrious Bishop. Lavigerie
had his own appearance depicted in the features of Saint Cyprian. In
this way, he strongly emphasized the he himself was
the initiator of Pope Leo XIII's reinstatement of the title 'Primate
of Africa'.
Studies in Paris, lecturing at the Sorbonne in 1854 and work on the
Roman Rota in 1861 comprised the first tasks of the future Cardinal.
They suffocated him. The pastoral governance of the Diocese of Nancy,
France (1863-66) did not exploit his capacities for action and could
not satisfy his creative urge, in spite of the many initiatives and
reforms he undertook in the area of Catholic teaching as well as in
training for clergy and those in Religious Life.
The Chapel of La Marsa is in the process
of being restored. Mgr Dominique Rézeau, Vicar General of the
Diocese of Tunis is in charge of it. Email: domy2@yahoo.com
From his final years of his own training, he was put in contact with
the most open-minded and reforming wing of Parisian clergy. They wanted
a more autonomous Church with regard to Rome and a more open one with
regard to the modern world. Throughout his life Lavigerie would retain
a tendency to rethink everything, reform everything. At the same time,
he was steeped in the wisdom of the ancient Church, something he had
seized upon during his specialised studies in history. Later on, his
experience of men and situations would make him more demanding for insisting
on an unfailing bond with the successor of Peter.
Important tasks such as the Oeuvre des Écoles d'Orient in 1856,
at a dramatic time in its history, allowed him to deploy his talents
for compassion and organisation. However, his real historic opportunity
came with his acceptance of the See of Algiers in 1866. It was a difficult
diocese, but somehow virgin territory, where everything, or almost everything,
remained to be done from the point of view of human development as well
as evangelisation. However, above all, Algiers for him was the open
door to an immense continent where he could fully deploy his creative
urge and lay out his credentials as leader.
'Instructions aux Missionnaires',
1950 edition, Namur, Belgique. There have been several French editions
of the Cardinal's 'Instructions to Missionaries of Africa', but none
in English.
If Cardinal Lavigerie was a man of action and reflection, he was above
all an apostle and consequently a man of God; these are qualities difficult
to harmonise in the lived experience of a single person. However, we
find them in him, something that can sometimes give the impression of
a certain ambiguity in his thinking or behaviour. Real options in politics,
economy and in the exercise of government, proper to the man of action,
often require qualities calling for subtlety within his compromises.
Additionally, we sometimes have the impression of finding in him contradictory
choices, unplanned changes, and more or less acceptable procedures that
square badly with a more spiritual, transparent, simple freedom of thought
and attitude.
The Cardinal, as we have said, is not primarily a thinker but a man
of action and an apostle. Admittedly, his thinking is found in his writings
and in his speeches, but more so in what he does and in the practical
instructions he gives. His originality is not to be sought in his doctrinal
exposés - (his theology in general is typical of his time) -
but in the original way he addresses the problems of his period and
finds solutions for them.
All the more so, therefore, it is in his actions that we need to deduce
his sentiments towards God and towards those men and women who share
his vision and projects. He is very restrained in this respect. Was
he defensively trying to rein in his exuberance? He had a strong personality
and the character of a leader. He was used to battling and he aimed
for results in his enterprises. Despite that, we sense in him a fine
and intensely sensitive heart, preoccupied with each and every individual,
seen especially in his personal letters to confreres and in his talks
to the Missionary Sisters of Our Lady of Africa.
These qualities of heart and the temperament of a leader are the source
of another focus of real tension (contradictions) in his life, noticeable
to those who knew him closely: harsh words and hasty decisions run concurrently
with truly humble and paternal attitudes and deeds. Times of great courage
and boldness are sometimes followed by times of pessimism, even discouragement.
His great speeches and his brilliant appeals - (which he knew so well
how to make) - are at once models of 19th century oratory and disclosures
of his life, full of personal truth and genuine human warmth, primarily
in favour of the poor and destitute.
It could have looked as though he were seeking honour, power and wealth.
Never, however, could he be accused of seeking them for himself, but
for his undertakings and his Mission, which true to say, he readily
identified with the Mission of the Church.
In his thinking, he established a narrow link between God, the Church
and the Pastor he was in himself. Consequently, in practice, we find
in his directives or in his behaviour, short-circuits between these
different levels. He could without difficulty shift from one level to
another especially where questions of honour or authority were at stake.
A man of his time, he professed a theology that easily identified the
Gospel with the Church and the Church with the hierarchy that it incarnates
and represents. In the same way, he straightforwardly associated evangelisation
and human development with Western culture, whose utmost expression
in his eyes was genuine French culture.
In conclusion, we can assert that from the combination of his life and
undertakings, a refined impression of Lavigerie appears. He emerges
as a great man and a great apostle. He was criticised for becoming involved,
or he himself willingly became involved, in all the important issues
of the Church and of the France of his day. The White Fathers and White
Sisters comprised only a part of his undertakings, but one which has
endured the longest and which he loved the most.
'Vent d'avenir,
Le Cardinal Lavigerie', by Father Joseph Perrier, published in 1992;
'Wind of Change' English translation by Father John O'Donohue (1993),
Brazilian Portuguese (1995) and Polish (1996). .
His Missionary Design
What was the basic intuition that gave birth to the Missionary family
of White Fathers-White Sisters that finds its origin in Lavigerie? I
say 'Missionary family' because, even if from the start there were two
autonomous and independent institutes, they both came into existence
from a single apostolic design and from an identical intuition. The
Cardinal addressed himself to Missionaries, Fathers and Brothers, by
instructions, letters and sermons. The same ideas, if not the same texts,
are nevertheless addressed to Missionary Sisters by the Cardinal himself.
In addition the Sisters recognised themselves in the texts addressed
to the Fathers and Brothers. That is why with the required adaptations,
what is valid for one is valid for the other.
From the writings of the Cardinal collected in Instructions to Missionaries,
the essential of the charism of the Society could be expressed in this
way: a group of apostles totally consecrated to God - life and undertakings
-for the Mission in favour of Africa, living in fraternal communities
according to a specific style comprising total availability, simplicity
of life and nearness to people.
Equally, the specific nature of both our Missionary Institutes is constituted
by the collection of these notes in which we find 1. A geographical
and human element: Africa as a 'continent' in the world as a whole.
2. A specific sector in the global Mission of the Church situated at
'its outer edges' and is evident in activities such as encounter, bearing
witness and dialogue with cultures and religions in the African world
in view of evangelisation, either by an initial proclamation or by the
creation and consolidation of Christian communities as well as by rendering
temporary services responding to the needs of the Local Churches not
yet able to take them on themselves. 3. A characteristic spirit stemming
from the particular spiritual emphasis the Founder wanted for the Missionaries,
and practical instructions for daily life and the apostolate. To this
are added elements of experience from life and apostolic undertakings
that the Society has long since claimed as its own throughout its history.
The Society of Missionaries of Africa and the Congregation of the Missionary
Sisters of Our Lady of Africa have not be 're-invented' today either
in their field of apostolate or in their basic tasks, or in their spirit.
Their basic features are still valid. Our task is to take stock of the
worthwhile nature of them in community, to use them as a yardstick and
to adapt ourselves to the circumstances and possibilities of the moment.
Following the succession of these ideas, here are some texts from the
Cardinal that are aimed at refreshing our memory.
1. Missionaries
"My dear Sons, you are not explorers or ordinary travellers
You
are apostles and only apostles; all the rest is in addition to your
apostolate." (Instructions aux Missionnaires, édition de
1950, p. 121) (Selected Texts, pp. 43-44)
Missionaries' tasks are varied and activities are numerous. For the
Cardinal, however, there is among them a very clear hierarchy. If Missionaries
are obliged to give themselves totally to many activities, they should
always bear in mind that they are apostles and only apostles, in other
words they are men (and women) of God, dedicated to God without conditions.
Missionaries consecrate their lives and undertakings to God for the
sake of the Mission.
We should read this in the light of the importance the Cardinal gave
to what was known as 'spiritual exercises'. They had first place above
all others. By fidelity to the practice of spiritual exercises, the
Cardinal aimed, not so much at observance of the Rule - nonetheless
importance in his eyes - but at the relationship between the Missionaries
and God.
"I am not going into details here about your spiritual observances;
they have no place in instructions such as these. But one thing I will
say which comprises all the rest: you must remain unwavering in your
fidelity to observe not only the spirit but also the letter of your
Rule. In particular, you must see to it that you do not omit your spiritual
exercises, whatever the difficulty or inconvenience." (Instr. p.
65) (ST34)
"My dear Sons, it is now you need a greater fidelity to your practice
of spiritual exercises. If you were unfortunate enough to lose the faith,
if you allow yourselves to behave like explorers or tourists, you will
surely be the losers. You risk being lost if at the head of all your
preoccupations you do not put practical means for maintaining and increasing
your spiritual life. Let mental prayer, particular examen, and Spiritual
Reading never be omitted, when not travelling; and even when travelling
when it is not possible to finish everything, to make up as best you
can for what you have been obliged to omit." (Instr. p. 138-139)
Total consecration to God for Missionaries will express itself in their
total availability - including death if required - to the service of
the Mission, given that the aim of Mission is the glory of God, God
known, loved and obeyed, as is fitting.
"You know what I wrote as the future motto of your Undertaking
on the testimonial letters one of you showed me on his arrival in Algiers.
I took the document and without a word wrote on it instead of the usual
formula the following one: Visum pro martyrio. Endorsed for martyrdom.
I gave it back to him and said, "Read that, are you prepared for
it? To which he replied simply, "That is what if have come for."
(Instr. p. 41-42). (ST23)
'Histoire des Origines la Congrégation
des Surs de Notre-Dame d'Afrique', (History of the origins of
the Congregation of the Sisters of Our Lady of Africa), by Sur
Marie-André du Sacré-Cur. This book (1946) provides
a respectful and contrasting description of the often-difficult relations
between the Cardinal Founder, 'Venerable Father', and his more than
ordinarily virtuous daughter, Venerable Mother Marie-Salomé,
the awe-inspiring and loyal first Superior General of the White Sisters.
2. Preferential option for the African world
"I would like dear Sons to make three recommendations, all of which
seem necessary if your undertakings are to thrive. The first is that
you never lose sight of the special character and spirit of your Society.
In deviating from its particular purpose you would lose the very reason
for your existence. Founded for the pagan peoples of Africa, it cannot
and must not undertake anything which runs counter to that objective.
Not only is its purpose special, so are the means by which it seeks
to attain that purpose, for these confer a particular character on its
action
Let other Congregations go their own way; they are equal
to the task assigned them and will be better at it than you could ever
be. Do not try to take over from them but be intent on tilling that
small portion of the field allotted you by the Father." (Instr.
p 52.) (ST26)
The Mission confided by Jesus to the Church extends to the whole world
(Mt. 28:18-20). For this task to be put into action, however, there
are particular, varied charisms allotted by the Spirit. (I Cor. 12:4-11.
27-30) These normally correspond to the felt needs in the world and
in the Church.
The charism of the Missionaries of Africa is deeply affected by the
peoples of Africa, as its reference to Africa implies. Lavigerie intended
it to remain truly faithful to it. Not only was Africa the birthplace
of the Society, but also the activity of its Missionaries was to be
addressed to Africans with the intention of bringing them to the Faith.
Other activities, places or people with whom the Missionaries would
deal had to be seen in this perspective or left to other apostles.
As early as 1873, the Cardinal warned the first Missionaries established
in Kabylia against, from his point of view, too-frequent meetings with
non-Africans. He even forbade them, so as to protect the Missionary
and African vocation of the embryonic group.
"My dear Sons, according to what I have received and what you tell
me yourselves, I fear that you may be throwing yourselves a little too
much into parish work to the detriment of Arabic undertakings and in
particular that you may be indulging a little too much in worldly matters
via the officers. You will lose your vocation in these risky pastimes."
(Instr. p. 30).
Mother Marie-Salomé (Renée Roudaut),
born in Brittany, France, in 1847. She died in Algiers, 18th October
1930.
|
Charles Cardinal Lavigerie, born in the Pays Basque,
France, in 1825. He died in Algiers, 26th November 1892.
|
3. Fraternal communities
"My final recommendation, dear Sons, is the counsel of the aged
Apostle of Ephesus, 'Filioli diligete invicem' 'Children, love one another'.
This is the most important of all my counsels, without it all the others
would prove useless. Love one another. Be ever united in heart and mind.
Be in very truth but one great family. Be ever penetrated by an esprit
de corps, in the Christian and apostolic sense of the expression. May
discord never gain entrance amongst you, may you be ever alert to defend
each other from external attacks made on your work or on your good name,
every ready to sustain each other, to come to the aid one of the other.
In a word, be not only united, but one." (Instr. p. 53) (ST 27)
For community life, the Cardinal insisted on two different but closely
linked aspects. On the one hand, observance of the Rules, achieved in
obedience to Superiors and on the other hand, fraternal charity. Each
of these aspects has its own characteristics but they must go together
and must always be seen in view of the functioning of the Mission. Obedience
safeguards the backbone of the community while fraternal charity forms
its heart.
In reference to this last feature in November 1874 before entrusting
the government of the Society to the General Council, the Cardinal told
the Missionaries what was the spirit of the institute. He did so by
giving them three basic recommendations: fidelity to Africa (see above),
prudence, charity in the exercise of apostolic zeal and brotherly love
embracing a true internationality.
"Until now you have been united, under my fatherly authority, in
a single sentiment and have had but one heart. That is the law I gave
you; I stated that I would not keep any of you who did not have the
same affection for all the members of the Society, irrespective of the
nation to which they belonged. You must preserve still more strongly
if possible, this brotherly attachment in the midst of all dangers and
fatigue, even in death itself. It is my ambition that in speaking of
your little Society, which by its origins is the humblest and the last
in the line of Missionary societies, it is said of it that at least
it is catholic above all else."(Instr. p. 260) (ST75)
4. Total availability
"I cannot resist asking this awesome question of your budding Society:
will it be a Society of truly obedient men? I hope so by the mercy of
God and your goodwill, which I acknowledge, and in this case I hope
it will be really beneficial to souls and to the conversion of this
immense continent to which it is sent. However if it were to be otherwise,
if pride, self-interest or defiance of authority were ever to prevail
among you, Alas! You and others with you would be on a death march and
it would be better if you had never been born
" (Instr. p.
59).
The Cardinal is an apostle and practically-minded. He has the character
of a leader who knows how to give orders and expects to be obeyed. He
likes order and discipline, though this does not explain everything
in his instructions and directives. He has also and above all, a keen
awareness of the demands required by a true consecration to God. In
his eyes, this will be not consecration for its own sake but for the
good of the apostolate. It will be a coordinated apostolate since it
is concerned with a group of apostles. It is therefore on observance
of the Rules and on obedience to Superiors that the Founder will insist.
He will highlight their intrinsic worth for the Mission.
In this way, perfect obedience is exacted as the expression of a total
gift of self to God and as the indispensable condition for the success
of the Mission. The Cardinal knows that, "Whoever refuses his obedience
to God and those representing him is actually refusing himself, in refusing
to surrender his will. Moreover, all the rest does not matter."
Lavigerie exacted the strictest fidelity, replete with sacred value.
In his view, consecration to God for the Mission was conveyed by total
availability under the seal of obedience. That is why he had St. Ignatius'
letter on obedience added as a supplement to the Rules he wrote for
Missionaries. Here is his explanation on that occasion in October 1875:
"The demand of perfect obedience is all the more indispensable
when Missionaries find themselves in quite peculiar circumstances. Neglect
or slackness in this area can destroy the Mission and that is the worst
possible error a Missionary can ever commit."
Likewise in March 1878, addressing the first Missionaries leaving for
Equatorial Africa, he wrote, "You must look on any lack of obedience
towards your Superiors as a sort of sacrilege; do not be surprised at
this word sacrilege which I use. Lack of perfect obedience in the circumstances
in which you will find yourselves, surrounded as you will be by difficulties,
temptations and dangers, will bring the Mission to ruin. And for a Missionary,
entrusted by God with the founding of a Mission, to bring it to ruin
is indeed a sacrilege and beyond all doubt the greatest of crimes he
could commit." (Instr. p. 65) (ST34)
The historical opus
of Fr. François Renault 'Le Cardinal Lavigerie, L'Église,
L'Afrique et la France' (1992) translated into distinguished English
by Fr. John O'Donohue entitled 'Cardinal Lavigerie, Churchman, Prophet
and Missionary' (1994).
5. Simple lifestyle
Alluding to a letter he received from a Missionary who wrote, 'I am
deprived of everything and yet I would change places with no king on
earth!' Lavigerie replied, ' "May God in his goodness keep you
in this spirit of cheerful generosity, 'God loves a cheerful giver.'
(2 Cor. 9:7) May he enable you to find the strength you need to sacrifice
everything, yourselves included to save these poor ones to whom he sends
you. That is the law of the apostolate, 'omnia impendam et superimpendar
ipse pro animabus vestris' 'I am willing to spend what I have and to
be expended in the interests of your souls.' (2 Cor. 12:15) May you
really live these words." (Instr. p. 42) (ST23)
The Cardinal knew the value of money. He had been entrusted with numerous
apostolic undertakings and he committed himself to many projects that
required enormous sums of money. He had to make frequent appeals for
the Oeuvre des Écoles d'Orient, orphans and victims of famine,
Missionary institutes, numerous building projects, sending caravan expeditions
to Equatorial Africa, the Antislavery Campaign and so on. He was obliged
to halt or curtail several of his undertakings for lack of funding.
Even his Missionary institutes were put in jeopardy for the same reasons.
Consequently, he knew what he was talking about when he asked Missionaries
for a life of genuine poverty.
On this matter, Lavigerie could have delved into spiritual literature
and presented to his Missionaries traditional motives for the practice
of poverty. Instead he preferred to lay out his own. They are apostolic
motives, namely, the life and survival of the Mission. He put it to
his Missionaries boldly, '
who must practice this virtue more strictly
than Religious.' 'Your rule is to live as the local inhabitants and
the Mission will soon fail if you do not do so
You will therefore
be working to destroy the undertaking in the not too distant future.
It can really only thrive in poverty and in assimilating to the local
inhabitants in respect of food and materials." (Instr. p. 35).
"Money squandered is so much less for the works of the Mission
and therefore to the redemption of souls." (Rules 1872, p. 17)
"Furthermore, resources come from the almsgiving of the poor.
'Missionaries are to bear in mind that they live from almsgiving and
the bread they eat is given to them by poor Catholics who take it out
of their necessities." (Rules 1872, p. 15)
Lastly, Missionaries must imitate Jesus Christ: "In all things,
Missionaries will be content to be treated even better than our Lord
Jesus Christ was, since it was the life of the poorest Arabs that he
lived." (Rules 1872, p. 14)
Cardinal Lavigerie often expressed
his thinking in commissioning works of art, (paintings, frescoes, and
statues), from celebrated artists of his time. Here, in 1869, the artist
Dubois followed the instructions of the Founder (represented on the
right, below the Venerable Geronimo, an Arab martyr). His missionary
family comprised the Sisters, Brothers (then dressed in black burnous)
and the Fathers. The Virgin Mary seems to be saying to them, 'Do whatever
he tells you'. (John 5:11) In addition, what the Lord Jesus said to
his missionaries is written, "I am the light of the world. Go teach
all nations." (John 8:12; Matthew 28:19-20). In 1879, the artist
Lazerges took up the motif of this painting again, in the chapel of
the Mother House in Maison-Carrée, with adaptations to the history
of our Institutes. (Les Origines de la Société, J. Mercui,
pp. 291-292, and Histoires des Origines, Sister Marie-André du
Sacré-Coeur, pp. 32-33).
6. Close to the people of the locality
The Society founded by Lavigerie has a 'particular character'. "This
character leads you to draw closer to the inhabitants, to adopt the
externals of their way of life, their language first of all, then their
dress and food, after the example of the Apostle, 'Omnibus omnia factus
sum ut omnes facerem salvos' " I made myself all things to all
men in order to save some at any cost." (1 Cor. 9:22) (Instr. p.
52) (ST26)
In the Cardinal's view, simplicity of life or poverty was already a
way to live close to the people.
However for him there was a second motive for this fundamental attitude:
apostolic effectiveness.
For a long time, the West believed in the superiority of its culture
faced with that of others. Cardinal Lavigerie probably shared this same
conviction, but only up to a certain point, in other words, with some
important distinctions. For example, on the one hand he was convinced
of the cultural and religious richness of the East and on the other,
he knew that one of the causes of problems between East and West was
precisely the West's superior culture pretensions and its tendency to
impose its patterns of thinking and expression on others. In addition,
he observed that the difficulty of trying to get the values of the Faith
to penetrate into their minds was because it was presented in a cultural
framework that was foreign. It was necessary therefore to distinguish
carefully between faith and culture, between Christian mores and the
customs proper to each people.
In the mind of the Cardinal, the ideas were clear, but the practical
discernment would be more difficult. It was not easy for him and it
is no less easy for us today to distinguish among the characteristics
of a people the elements to retain and those requiring change. However,
just to assert the principles involved is already an enormous advantage.
In the same way, Lavigerie sought to have a group of apostles immersed
in a culture of a people in the midst of whom they worked: habitat,
food, language, habits, and customs. It included everything that was
not contrary to Christian faith and morals and could be adopted by the
Missionaries while at the same time ensuring that the people should
remain faithful to their own culture. Only in this way could the faith
sink deep roots and new Christians become convincing apostles among
their own peers. The writings of the Cardinal on this subject are very
numerous. In a basic text partly referred to earlier, and among the
most well known, Lavigerie writes,
"The first (of my recommendations) is that you never lose sight
of the special character and spirit of your Society. In deviating from
its particular purpose you would lose the very reason for your existence.
Founded for the pagan peoples of Africa, it cannot and must not undertake
anything that runs counter to that objective. Not only is its purpose
special, so are the means by which it seeks to attain that purpose,
for these confer a particular character on its action. It is a character
which lead you to draw closer to the inhabitants to adopt the externals
of their way of life, their language first of all, then their dress
and food after the example of the Apostle, 'Omnibus omnia factus sum
ut omnes facerem salvos ' "I made myself all things to all men
in order to save some at any cost."(1 Cor. 9:2)
Bear well in mind that whenever an unreasonable urge to innovate leads
you to tamper with these two points, you will be doing your utmost to
destroy the very purpose for which your Society exists. For you were
founded simply and solely to meet the great needs of the Africans and
to meet them with the means we have mentioned." (Instr. p. 52)
Apostolic effectiveness is the basic reason for the Cardinal coming
close to people, but at the heart of the apostolate he gives first place
to love (Charitas) for God, of course, but also for people. Nearness
to people for the sake of effectiveness, nearness and effectiveness
for the sake of love.
"My own motto, love, love of God and love for poor abandoned souls.
This love upheld me in the midst of difficulties and undertakings that
wore me out before my time. It is this love also which will give you
strength, heroic renunciation, and the necessary perseverance to draw
back from death the people to whom you are sent.
Love them as a mother loves her sons, in proportion to their misery
and their weakness. Love Africa which is far from us, in its bleeding
wounds of slavery, its painful cries which have been rising from the
depths for so many centuries; love Africa which is more a neighbour
and which was once Christian, for its past misfortunes, for its great
men and its saints.
Love it, although you may have suffered from it so that you may suffer
further
Love it with its memories, its legends, its traditions
of respect and faith, its stoic resignation that holds it paralysed
in its sepulchre
The Patriarchs loved even the stones of Sion, for them, the symbol of
so much hope
By their example, I have loved our Africa, its past,
its future, its mountains, its pure sky, its sun, and the great sweep
of its deserts, the azure streams that bathe it.
May you hear my voice! It will soon be stilled in this world but from
the depths of the tomb it will maintain the same views that you have
known for so many years." (Instr. p. 210)
Jesús Salas
Rome
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