NOTICES BIOGRAPHIQUES

Père LOUIS VERNHET

1940 - - 2019

...Louis est né le 5 Juin 1940 à Tripiers dans la Lozère, au milieu des garrigues et des troupeaux de brebis entre les gorges du Tarn et la Jonte. Il est toujours resté très attaché à sa belle région natale.
Il a rencontré l'Afrique à l'occasion de son service militaire en Algérie. Il est entré au grand séminaire de son diocèse puis a fait sa demande d'être admis chez les missionnaires d'Afrique, se sentant appelé à être missionnaire au Sahara, auprès des musulmans. Il fait son noviciat à Gap en 1965, avant de reprendre ses études de Théologie à Vals, où il prononça son serment le 26 Janvier 1968. Il sera ordonné prêtre à Tripiers le 21 juillet 1968. Durant toute sa formation on n'a eu qu'à se féliciter d'un tel candidat.

Voici l'appréciation de son maître de novice, le père Longin : " Homme de prière, d'écoute, de réflexion, profitant pleinement de cette année spirituelle. Grande générosité ; très ouvert à l'égard des autres novices et bonne influence à leur égard. Beaucoup d'humour. Bonne participation dans les différents services du noviciat. Sportif, aimant les longues randonnées les jours de détente. Excellent novice, prometteur pour l'avenir ".

Il avait commencé à apprendre l'arabe, mais à sa grande surprise, lui qui avait pensé aller au Sahara, reçut sa nomination au Congo Kinshasa, à la capitale même.
Après un stage de trois mois pour apprendre le lingala, langue parlée à Kinshasa, il est nommé vicaire à la nouvelle paroisse Saint Etienne de Kisenso, quartier de " Kin ".

La première résidence est très pauvre : une salle d'accueil et de séjour, une chambre, une cuisine et une salle d'eau. Pour sa première nuit, Louis s'installe entre un fauteuil et un divan qui lui servira de lit. Il case ses cantines dans le couloir. Le curé lui dit " On t'attendait pour agrandir la maison. Tu n'as jamais fait de construction ? Ne t'en fais pas, tu apprendras sur le tas ".

De fait, Louis est devenu un grand constructeur. On disait de lui qu'il avait mangé une brique. Il a su former une équipe professionnelle de maçons, de menuisiers, avec laquelle il a construit de très nombreuses églises, écoles dispensaires et autres bâtiments.

En 1977, il est nommé curé de la paroisse de Livulu.

En 1982 il est nommé conseiller de la région, représentant le secteur Kinshasa. Ce secteur qui dépendait avant de la région du sud-est Zaïre, a été rattaché à la région de l'Ituri.

Louis est donc resté 20 ans en paroisse à Kinshasa. Ce qui le caractérisait, c'était sa générosité, le don total de sa personne à la mission. Il pouvait dire avec saint Paul : "Annoncer l'Évangile pour moi, n'est pas un motif d'orgueil, c'est une nécessité qui s'impose à moi. Malheur à moi si je n'annonce pas l'Évangile ".
Il accordait beaucoup d'importance à la formation des laïcs : responsables des communautés de base ou des différents mouvements. Il prêchait retraites et récollections aux religieuses, qui appréciaient beaucoup ses instructions. Elles aimaient travailler sous sa conduite car il savait faire confiance à ses collaborateurs.
Ses homélies à la messe étaient très vivantes, toujours bien préparées. Une bonne connaissance de la langue et de la mentalité des gens, lui permettait au cours de ses homélies d'interroger, de faire réagir. Ses paroissiens aimaient l'écouter, pas question de dormir quand il prêchait.

Louis aimait les belles liturgies en rite zaïrois. Il était rayonnant de joie quand, coiffé de la coiffure traditionnelle des chefs, comme le recommandait le rite zaïrois, il tournait au tour de l'autel avec les servants, chantant et dansant, tout en balançant son encensoir qui remplissait le chœur de la fumée d'encens. Sa joie était de sentir ses paroissiens tous unis dans la prière, l'action de grâce et la joie. Une messe pouvait durer près de deux heures.. personne n'était fatigué.

Il faut dire que Louis était très aimé de tous, de ses confrères d'abord, mais aussi des sœurs et de tous les paroissiens, et cela à cause de sa générosité, de son zèle, de sa joie communicative aussi.. Disons à cause de sa charité : toujours accueillant, souriant, il mettait en pratique l'enseignement de Saint Paul dans l'épître aux Corinthiens " L'amour prend patience, l'amour rend service, il ne jalouse pas, il ne plastronne pas, il ne s'enfle pas d'orgueil, il ne s'irrite pas ". C'est le portrait de Louis.

Aimé de ses paroissiens, il était aimé et respecté de ses confrères. Sa gaîté, son humour, sa façon de
faire confiance à ses collaborateurs ont fait que tout naturellement il a été choisi comme représentant de ses confrères au conseil régional. Louis n'était peut-être pas ce que l'on appelle un intellectuel, mais sa sagesse, sa générosité et son bon sens l'ont fait remarqué par le Cardinal Malula qui l'a choisi comme conseiller, et aussi par nos supérieurs à Rome qui lui ont rapidement confié de grandes responsabilités.
En avril 1988 il est nommé à l'animation missionnaire à Lyon, mais il n'a pas eu le temps de s'y rendre, car il a été aussitôt nommé supérieur régional de l'Ituri, à Bunia. Il exercera cette fonction pendant deux mandats, de 1988 à 1994, à la grande satisfaction de tous. Il savait écouter, encourager ses confrères. D'une robuste santé, il visitait régulièrement les différentes communautés. Il y avait d'abord celles de l'Ituri, des diocèses de Bunia et Mahagi, puis celles de Kisangani à 700 kilomètres de Bunia, et de celles de Kinshasa à près de 2000 kilomètres.

Il a eu à affronter les mauvaises routes de l'Ituri, et les très nombreux passages de rivières sur deux troncs d'arbre. Lors d'une visite qu'il avait faite en Ituri à l'occasion d'un conseil régional, il avait déclaré : " jamais je ne serai nommé dans ce coin avec de telles rivières ! " Dieu en avait décidé autrement.
A la fin de ses deux mandats comme régional, Louis espérait retourner à Kinshasa, et de fait il est nommé curé à Kisenso, mais pas pour longtemps car en 1999 il est rappelé en France comme économe provincial, et conseiller provincial.

En 2004, il est élu supérieur provincial, fonction qu'il assumera jusqu'en mai 2008.
Pendant tout ce temps il a eu de grandes décisions à prendre tout spécialement sur l'avenir de nos maisons de retraite. Nous ne pouvions plus en assurer la direction. A quel organisme confier la gestion de nos trois maisons ? Il était nécessaire d'agrandir… fallait-il démolir pour construire du neuf. Louis a su écouter, collaborer avec ceux qui se trouvaient sur place, réfléchir et … prendre des décisions.

Pendant ces neuf ans passés à Paris, Louis était très pris par ses responsabilités administratives. Toujours accueillant et à l'écoute de ses confrères. Mais il a gardé sa passion de l'évangélisation. Il a assuré pendant tout ce temps l'aumônerie de la communauté des africains à Paris. Il y a consacré tous ses dimanches.

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Avec la Communauté Catholique Des Africains
1ère photo visite du Cardinal Lustiger à la communauté.


Louis a écrit dans un journal lozérien : " Comment se fait-il que moi, le lozérien qui ai grandi au cœur des Cévennes, qui avais rêvé des sables du désert, je me suis retrouvé dans une grande capitale avec ses turbulences, se agitations débordantes ? Partout où j'ai été envoyé, que ce soit à Kinshasa, aux grands lacs ou en plein cœur de Paris, j'ai été heureux. Mais je garde tout de même au fond du cœur le désir de repartir pour le Congo où tant d'amis m'attendent ".

En mai 2008, il est nommé au Congo, curé de la paroisse d'Aru, à la frontière de L'Ouganda, paroisse où le lingala était utilisé.
Louis s'est lancé aussitôt avec son zèle habituel à animer cette paroisse. Visitant à pied ses trente-cinq succursales, il ne ménageait pas sa peine. Disons même qu'il n'était pas raisonnable. Il était de forte constitution certes, mais il n'avait plus vingt ans. Il a bien entendu entrepris la construction d'églises…
Ses jeunes vicaires africains ont apprécié travailler avec lui. C'était pour nous un " papa " ont-il dit. Mais les confrères se sont rendu compte que Louis avait des oublis, des absences, des troubles de l'esprit, et les supérieurs ont décidé que Louis devait rentrer en France pour des examens médicaux sérieux.

En septembre 2013, Louis rentre donc et le diagnostic des médecins est inquiétant. Louis est d'abord nommé à Mours, où sa joie était de se promener dans le parc, et d'y travailler. Son état se dégradant rapidement, il est nommé à Billère dans notre maison de retraite.

Louis avait déjà perdu tous ses repères : ne comprenant pas où il se trouvait, depuis quand il était là. Mais il était toujours le confrère agréable, gai, très aimé du personnel. Il avait toujours gardé un certain humour et aimait être taquiné. Il passait ses journées à se promener dans le jardin, un bâton à la main, ramassant des petites branches d'arbre, récitant son chapelet : toujours très fidèle à participer à la prière communautaire.

Mais Louis a commencé à fuguer. Plusieurs fois le personnel a dû faire appel aux pompiers ou à la
police pour le retrouver. Il devenait donc impossible de le garder dans notre maison de retraite, et il a fallu lui trouver une place dans un établissement spécialisé, à Vic en Bigorre.
C'est là qu'il a vécu ses derniers mois. Très apprécié par le personnel soignant et par les résidents, Il était de plus en plus perdu, parlant le lingala, ne sachant pas où il se trouvait, ne reconnaissant pas les confrères qui le visitaient.

Un témoignage touchant nous a été rapporté par une aide-soignante : " Nous regretterons beaucoup son départ, nous l'aimions pour sa gaîté sa gentillesse. Il réunissait les résidents pour leur dire la messe. " (En fait il ne disait pas la messe mais faisait prier les résidents malades comme lui, et leur parlait du Bon Dieu. Il était resté le missionnaire : " malheur à moi si je n'évangélise pas ! "

C'est à Vic en Bigorre que Louis est mort le 3 mars 2019. La messe des obsèques a eu lieu dans notre chapelle de Billère. Une dizaine de membres de sa famille s'étaient jointe à la communauté. Louis laisse à tous le souvenir d'un excellent confrère, et d'un véritable fils du cardinal Lavigerie. Il reste pour tous un modèle du véritable Père Blanc. Nous ne doutons pas que le Seigneur l'ait reçu en lui disant " Viens, bon et fidèle serviteur, entre dans la joie de ton Maître "

Bertrand Gayet

 



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