Pères Marcel Forgues et Charles Bailleul, M.Afr

Richesses Médicinales
Du Bénin, Burkina Faso,
Mali, Sénégal, Togo…
Pays de la zone sahélo-guinéenne


Préface

Père Charles BailleulLe Père Charles Bailleul propose un manuel pratique et simple de traitement. Ce travail est la consécration de plusieurs années de recherche. Il est en même temps le condensé de plusieurs expériences.
L'importance des plantes dans l'arsenal thérapeutique est de plus en plus à l'ordre du jour, surtout en Afrique. En effet, son utilisation constitue la première démarche à laquelle se soumettent les patients avant de consulter la médecine moderne. La préoccupation actuelle consiste en l'utilisation rationnelle de ces plantes pour le bénéfice d'un grand nombre d'entre eux.
P. Marcel ForguesLe Père Charles Bailleul a donc choisi une voie habituelle, moderne, de présenter ces plantes médicinales qui ont fait leurs preuves dans beaucoup de pays. Cette voie accessible offre la possibilité à plus d'un médecin, infirmier, agent de santé et thérapeute t:raditionnel de se l'approprier pour atténuer la souffrance de leurs semblables.
En mettant son expérience au service de la médecine, le Père Charles Bailleul, a su faire sasser ces plantes, la plupart médicinales, au " pressoir de la médecine moderne ".
Nous le félicitons très sincèrement pour ce travail et pour sa grande connaissance au service de la communauté scientifique.
Dr Pierre Traoré
Dermatologue au CNAM* (ex Institut Marchoux)
* CNAM: Centre National d'Appui à la Lutte contre la Maladie

Pères Marcel Forgues et Charles Bailleul M.Afr

Richesses Médicinales
Du Bénin, Burkina Faso,
Mali, Sénégal, Togo…
Pays de la zone sahélo-guinéenne

Collection Pratique 160 pages
ISBN 99952-0-049-X
Editions Donniya 2009 Bamako Mali


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AVANT-PROPOS - HISTORIQUE

En octobre 1979 le Père Marcel Forgues se décidait à partager ses notes sur les médicaments traditionnels (notes recueillies depuis 1952 pendant 27 ans, dans les paroisses de Didir, Réo, Yimansgho, Koudougou et Léo au Burkina Faso, alors Haute Volta).

Son petit livret imprimé par les soins du CESAO' avait comme titre Quelques remèdes simples, utilisés en Haute Volta. Il eut un deuxième tirage en 1983. Sa dernière mise au point date de septembre 1993, sous le nom de: Richesses médicinales au Burkina Faso. Elle n'a été publiée que sur le site internet Sedelan. Elle propose 59 recettes médicinales traditionnelles, expérimentées avec succès dans les Centres de santé de ces différents postes; utilisant 43 plantes bien identifiées par leur nom scientifique et leurs noms vernaculaires en trois langues du pays: le mooré, le lyélé et le nuni.

Dès le début, dans son Introduction, il souhaitait que d'autres prennent le relais en ces termes: " Ces recettes sans prétention, ont été recueillies auprès de personnes âgées ne faisant pas profession de guérisseurs. Elles ne voulaient pas garder jalousement pour elles leurs connaissances. C'est leur exemple qui m'a poussé à les imiter; en espérant que ce travail pourra être complété et corrigé si besoin, par d'autres plus compétents, tant en botanique qu'en pharmacopée. "

De son côté, le P. Charles Bailleul, arrivé au Mali 14 ans plus tard, s'intéressait, entre autres domaines à la botanique. Il recherchait avec assiduité le bon nom des plantes dans la langue bambara, et regrettait de ne pas trouver d'ouvrages offrant des recettes médicinales. En effet " les thérapeutiques modernes, qui grèvent le budget de la 'Sécurité sociale' dans les pays riches, restent inaccessibles à l'immense majorité des Africains. "

À l'époque, le livre de Dominique Traoré Médecine et magie africaine, paru en 1965, fourmillait de renseignements sur les plantes utilisées au Mali pour soigner nombre de maladies; mais il n'indiquait guère la technique de préparation, et plus rarement encore le dosage.

En 1972 le Père Bernard de Rasilly, missionnaire au Mali, diffusait à quelques dizaines d'exemplaires des notes sur la pharmacopée traditionnelle prises de 1956 à 1972 dans la zone sud-est du Bani (cercles de San et de Tominian). Hélas, nous n'en avons eu connaissance que tout récemment. Ces 35 pages polycopiées en format A4 élargissent ainsi la documentation qui suit, et confirment bien des recettes médicinales.

En 1974, J. Kerharo et J. G Adam publiaient un livre de 1 000 pages intitulé La Pharmacopée sénégalaise traditionnelle: plantes médicinales et toxiques. Ce livre ne donnait pas de recettes, mais il reste " la " référence concernant les résultats des analyses chimiques détaillées de toutes ces plantes, faites avant cette date.

De 1974 jusqu'en 1979, le Père J. Berhaut, missionnaire spiritain, dans les six premiers tomes de sa Flore illustrée du Sénégal, relevait les emplois connus de chaque plante et, de temps en temps, notait une recette médicinale bien dosée. Cette flore permettait une bonne identification des plantes à partir des dessins grandeur nature des feuilles, fleurs et fruits. Il est bien dommage qu'il n'ait pas pu terminer son magnifique travail. Des botanistes ont bien pris la relève, mais sans reprendre ses notes sur les divers emplois traditionnels.

Dès 1980, outre le livret du P. Forgues, la documentation francophone sur la pharmacopée africaine, indiquant des modes d'emploi, a commencé à s'étoffer.

En 1981, Mme Annick Thoyer Rozat, " à partir d'ouvrages disponibles en bibliothèque, veut rendre accessible des études de spécialistes " et fait paraître un petit livre de format bien pratique, intitulé Plantes médicinales du Mali. Il a rendu bien des services à ceux qui ont connu son existence. Elle-même reconnaissait à l'époque que " les lacunes les plus importantes étaient les doses des plantes, l'absence de photos en couleur de plante entière, et de détails de plante permettant une bonne identification... ".

De 1981 à 1985, le Père César Fernandez de la Pradilla, biologiste de formation, enseignant au petit séminaire de Pabré (au Burkina Faso), publiait le résultat de ses recherches et expérimentations dans plusieurs fascicules ronéotypés, totalisant pour les deux ouvrages mentionnés en note 275 recettes, concernant 115 espèces de plantes.' Les personnes qui ont testé l'efficacité des recettes indiquées n'ont pas été déçues.

A la même époque l'ACCT lançait une collection Médecine traditionnelle et pharmacopée. Deux ouvrages parvenus à notre connaissance concernaient la zone : Contribution aux études ethnobotaniques et floristiques au Mali paru en 1985 et Contribution aux études ethnobotaniques et floristiques en République populaire du Bénin paru en 1989. Le premier rapportait quelques 150 recettes de tradipraticiens; le deuxième près de 2000 recettes, tirées d'environ 500 espèces de plantes. C'est une mine qu'on est loin d'avoir exploitée et minutieusement vérifiée, pour en faire bénéficier au moindre prix le maximum de personnes.

En 1989, Jean-Louis Pousset, professeur de pharmacognosie, cherchait à faire profiter de sa science les non spécialistes, d'abord dans son livre Plantes médicinales africaines... Par la suite en 2004, il reprenait ce premier travail en l'étoffant, sous le titre: Plantes médicinales d'Afrique: comment les reconnaître et les utiliser. Sur les 115 plantes étudiées, les 2/3 d'entre elles concernent des espèces de la zone sahélo-soudano-guinéenne qui nous intéresse. Les photos en couleur facilitent leur identification, et les détails sur les analyses chimiques rassurent les plus réticents.

En 1992, le Père Denis Maigres, ingénieur agronome, présent au Mali depuis 40 ans, a dressé un inventaire des Arbres et arbustes guérisseurs de la savane malienne co-édité par ACCT-KARTHALA. Chacune des monographies relève les utilisations des parties de la plante en pharmacopée traditionnelle. La technique de préparation est très souvent mentionnée, mais non le dosage. Grâce à. ce type de présentation, il est facile de vérifier si telle recette utilisée au Mali l'est aussi dans un autre pays de savane. En effet, suivant le principe donné par le pharmacologue Jean-Louis Pousset, " une plante traditionnelle peut être généralisée si elle obéit à plusieurs critères: peu ou pas de toxicité, utilisation pour une indication donnée dans plusieurs pays du Sahel (Sénégal et Nord-Nigeria par exemple), posologie précisée... "

En 1997, Enda tiers-monde a aussi publié Plantes médicinales du Sahel, présentant d'une manière très détaillée et bien documentée 55 espèces utiles de cette zone et des zones plus méridionales. La méthode de travail et la prudence des recommandations y sont exemplaires.

Nous sommes en 2008, la démarche du Père Marcel Forgues reste d'actualité: faire profiter le petit peuple des richesses médicinales africaines, en vérifiant et affinant progressivement les recettes traditionnelles: celles léguées par les parents et amis, comme celles des thérapeutes traditionnels, qui ont accepté de faire part du savoir de leurs maîtres.

Les personnes les mieux placées pour ce genre de travail sont les médecins et les infirmiers, dans les petits hôpitaux et dispensaires. En effet, certains dispensaires, même en zone rurale, sont maintenant dirigés par des médecins diplômés, ayant sous leurs ordres des infirmières et infirmiers diplômés, disposant parfois de laboratoires, qui permettent de vérifier avec certitude les diagnostics.

Leur formation scientifique les rend prudents, dès qu'il s'agit de plantes dont la toxicité a été étudiée et reconnue... À ce sujet, il faut reconnaître que quelques rares guérisseurs traditionnels n'ont pas toujours la même circonspection.
Pour ne citer qu'un exemple vécu, remontant à une trentaine d'années: un jeune homme s'étant aperçu de l'apparition de taches blanches indolores, signes de la lèpre, partit se confier à un marabout guérisseur aux alentours de la capitale. Il est revenu quelques mois après, méconnaissable, au bord de la tombe.

Renseignements pris, le guérisseur lui avait donné à plusieurs reprises 6 graines de ricin (Ricinus communis) à manger avec un poulet. Or, Kerharo, signalant la toxicité de la graine de ricin dans l'ouvrage cité ci-dessus, dit ceci à la page 430: " Les graines sont extrêmement toxiques. La dose mortelle est de 5 à 6 graines pour l'enfant et de 10 à 20 pour l'adulte "... (Pour les animaux, le tableau de la toxicité des graines révèle que le cheval est 140 fois moins résistant que la volaille.) Quelques semaines plus tard, le jeune homme ainsi traité mourait. Le guérisseur avait peut-être tué le bacille de Hansen, responsable de la lèpre, mais très probablement aussi provoqué la mort de son hôte ! La résistance du poulet n'avait pas suffi comme antidote.

Revenons à nos agents de santé. Ils sont aussi les plus à même de comparer les différentes recettes et d'en affiner les techniques. Par exemple:

Au dispensaire de Falajè, la soeur infirmière ayant appris que la poudre d'écorce de racines de la liane nsàban (Saba senegalensis) était efficace pour soigner les brûlures, a essayé différentes techniques. Finalement, il lui est apparu que la pommade faite avec cette poudre, mise en cataplasme sur la brûlure bien nettoyée, était le procédé le plus rapide. En cinq jours, des brûlures larges comme la main étaient complètement guéries. Au deuxième jour, si le pansement dégageait la moindre odeur, elle nettoyait de nouveau la plaie et remettait un cataplasme. Sinon, en 5 jours, la nouvelle peau était là et ça ne suintait nulle part. J'ai pu moi-même le constater sur un jeune garçon, qui dans la nuit sans lune, croyant s'asseoir sur un petit tabouret, s'était assis sur une calebasse dans laquelle la maman venait de verser de l'eau bouillante !

Or, d'autres recettes efficaces contre les brûlures existent, en particulier la poudre de feuilles de l'arbuste (Guiera senegalensis) appelé kùnje en bambara. Il est clair que mieux vaudrait utiliser un remède à base de feuilles d'un arbuste très commun, qu'un autre à base de racines d'une liane qui devient rare. Les tests comparatifs d'efficacité ne compliqueraient pas tellement les soins; et si, malgré tout, le remède à base de racines de liane était nettement plus rapide, on pourrait le réserver aux grands brûlés pour hâter leur guérison. Ainsi seraient sauvegardées à la fois la vie du patient et la flore du pays.

Il est facile aussi, dans les dispensaires, de maîtriser les techniques de cueillette et de con-servation des plantes médicinales: bouteilles et bocaux en verre, fermeture hermétique...
Il est grand temps que, pour le bien des petites gens, davantage de centres de santé s'intéressent à ces recettes, dont nombre d'entre elles sont cautionnées par des spécialistes.

Pourquoi enfin ne pas utiliser le terrain de ces centres de santé pour y planter, non pas seulement des " nims " (Azadirachta indica), mais d'autres arbres du pays, en plus des plantes d'ornement telles que l'aloès (Aloe vera), l'orgueil de Chine (Poinciana pulcherrima), la pervenche de Madagascar (Catharanthus roseus), le Kalanchoe pinnata, ... aux vertus médicinales reconnues? Éviter aussi de traiter l'Euphorbia hirta comme une mauvaise herbe... elle est si efficace en cas de dysenterie amibienne !

Conclusion: avec l'accord du P. Marcel Forgues et selon son désir, je poursuis donc son travail en y ajoutant d'autres recettes relevées dans la documentation existante et expérimentées avec succès dans d'autres dispensaires privés catholiques du Mali et du Burkina Faso; ainsi que des photos en couleur et quelques détails botaniques, pour bien identifier l'espèce en question.

Hélas, la polychromie a un prix. Pour que l'ouvrage reste accessible, il a paru bon de laisser de côté le détail des analyses chimiques, qui n'intéressent que les spécialistes. Les dispensaires les mieux lancés auront à cœur sans doute de posséder dans leur bibliothèque les ouvrages de base signalés plus haut.

Une remarque encore: la zone sahélo-soudano-guinéenne qui nous intéresse, est habitée par de nombreuses ethnies parlant de nombreuses langues. Il est impossible de pouvoir donner le nom des espèces dans chacune d'entre elles. Le choix a été fait de donner, outre le nom scientifique latin, le nom en bambara, langue la plus communément parlée et comprise au Mali, au Burkina Faso ouest, au Sénégal et en Côte d'Ivoire, ainsi qu'en mooré; laissant aux utilisateurs le soin de noter le bon nom dans la langue maternelle des gens qu'ils soignent; la meilleure référence restant le nom scientifique latin. Pour ce faire, il serait bon que dans chaque grand dispensaire, il y ait quelqu'un qui se spécialise dans la botanique.

Tel quel, ce recueil pourra aussi intéresser toute personne instruite, bien avertie des différentes maladies, de leurs symptômes et caractéristiques, et du diagnostic scientifique donné par la médecine moderne; mais notre espoir premier est de susciter des émules dans tous les Centres de santé, privés ou non.
Si d'autres recettes bien testées, ou des perfectionnements dans le mode d'emploi sont connus des lecteurs, et qu'ils veuillent les communiquer, ils seront bien accueillis et ils pourront sans doute compléter utilement à l'avenir ce recueil.
Enfin, pour simplifier la préparation des médications, et convaincre les plus réticents de leur efficacité, rares sont les recettes de ce livre faisant appel à plusieurs plantes, bien que les spécialistes reconnaissent aux mélanges de plantes une synergie particulière.

Merci à tous ceux et celles qui m'ont encouragé, ou ont fait part de leur expérience en la matière; en particulier:
- Père Marcel Forgues, coauteur,
- Dr Pierre Traoré, dermatologue à la léproserie de Jikoronin (Mali),
- Sr Marguerite Koné (mgk), travaillant à la maternité de Falajè, fille de thérapeute traditionnel,
- Sr Maguy et Sr Bernadette du Centre nutritionnel de Kolongotomo (klg),
- Sr Françoise Wyckaert (fw) de Fanterela,
- Sr Clara de Ségé,
- Mme Micheline Konaré (mk) de Falajè, initiée dans son adolescence à la pharmacopée traditionnelle par le marabout-guérisseur de Wolonin,
- Gaston Sangaré, originaire de Falajè, gestionnaire de station de recherche agricole au Bénin.
Merci à toute la tradition africaine, qui remonte dans la nuit des âges, et sauvegardait à sa manière la science accumulée par les ancêtres. Chaque nouveau livre qui paraît sur ce sujet a sans doute sa petite originalité de présentation; mais les recettes, elles, sont le legs de la tradition africaine elle-même, et de sa magnanimité. Elles se recoupent et se confirment les unes les autres, pour le bien du plus grand nombre.

Fait à Bamako, juillet 2008

Père Charles Bailleul : boonsiblen@gmail.com (Vous pouvez lui commander le livre)

1. CESAO: Centre d'Études Économiques et Sociales de l'Afrique Occidentale, établi à Bobo-Dioulasso
2. Préface du Dr Claude Blanc au livret du P. Forgues

3. - " Des plantes qui nous ont guéris " décembre 1981 Tome I - " Des plantes qui nous ont guéris " 1985 Tome II

 

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